ACID MOTHERLY LOVE
On ne se frotte pas décemment à AMT et à ses innombrables déclinaisons avec sa raison. Les risques de perte de repères sont trop grands et très vite, les notions habituelles telles que « qui fait quoi sur quel(s) disque(s) » perdent toute signification et les chausse-trappes de la folie guettent le moindre de vos (faux) pas. Ce space rock ultime qui ferait passer Hawkwind pour Yves Duteil garde, même après un nombre incalculable d'albums que personne ne s’est risqué à comptabiliser, un taux de saturation psychédélique d’origine chimique et naturelle (bien que largement prohibée) hors de toutes proportions. Mieux que de simples revivalistes qui s’échineraient à chasser les mirages d’une époque révolue (celle d’Amon Düül II ou des Gong séminaux) AMT relie ce passé lestement connoté au présent, ou plutôt force la porte des couloirs du temps en barbouillant ses délires cosmiques de raturages bruitistes explosifs et de drones néandertaliens, en y insufflant d’obscurs mantras aux origines incertaines et en y injectant une solide dose d’humour. Que ce soit sous ses déclinaisons Cosmic Inferno, Mothers Of Invasion (fume, c’est du Zappa) ou encore Pink Ladies Blues (la liste n’est pas close), l’unique membre permanent de l’entité protéiforme Acid Mother Temple, Kwabata Makoto, n’a pas son pareil pour pasticher, titres de chansons et pochettes d’albums anthologiques de l’histoire du rock. Et sur ce disque on veut bien parier qu’il se fiche gentiment de la pomme du Iggy Pop « spoken word » de l’excellent album « Avenue B » de 1999. Roulez vieillesse…
Yannick Hustache