RENÉ
Il faut prendre René comme une métaphore. Par exemple,
Il faut prendre René comme une métaphore. Par exemple,
comme celle de la baleine blanche. Le tonnage est proche. Métaphore de
quoi ? De la mauvaise graisse que l'on accumule. Qui fait masse. Englobe tout. Efface tout profil, tout
atome crochu. Plus rien ne fonctionne, plus d'échange, tout est absorbé
par le poids à porter, à déplacer. Il n'y a de place pour
plus rien d'autre. Forcément, l'amour est soluble dans une telle masse
adipeuse. La relation à l'autre est, elle aussi, "avalée".
L'autre n'existe plus. Il n'est plus visible, il est écrasé par
la tonne et demi. Forcément, il y a une lettre de rupture. Qui déclenche
une prise de conscience. La viande énorme est filmée sans complaisance,
de très près, comme à l'abattoir. Presque morte, une panse
comme une montagne de glu. Couleurs, teintes, cadrages, vitesse et heurts du montage,
la caméra travaille comme une machine d'équarrissage. Un personnage
débordant, à équarrir.
Mais soudain elle bouge, la viande, elle se secoue. René entreprend de revenir à des proportions humaines. À partir de quoi, tout sera de nouveau possible : échanger, séduire, s'aimer. C'est un effort constant. Aucune faiblesse n'est tolérée. Chacun, dans l'entourage, contribue. Dans la manière de favoriser un climat encourageant, attentif. C'est une lutte. Heureusement, le film ne suit pas un scénario traditionnel. La narration est faite de moments successifs, elle tend à fixer une énergie positive, celle qui consiste à se transformer pour se rapprocher des autres, revenir dans leur vie. C'est le devenir de cette énergie qui compte, pas de savoir si René va retrouver sa compagne dans l'histoire. Le personnage rayonne d'une dynamique de "remise en forme" dans tous les sens du terme. Il n'y a pas de compassion, pas de dramatisation, pas de comédie autour de l'obésité. Pour éviter la théâtralisation du "gros", Cavalier a choisi une forme très documentaire. Dépouillée mais stylée. L'approche, non conventionnelle, développe un regard très riche. Sympathique, nageant vers le bonheur, René ressemble de plus en plus à un porte-bonheur, une baleine blanche.
(Pierre Hemptinne, Charleroi/Mons)
Mais soudain elle bouge, la viande, elle se secoue. René entreprend de revenir à des proportions humaines. À partir de quoi, tout sera de nouveau possible : échanger, séduire, s'aimer. C'est un effort constant. Aucune faiblesse n'est tolérée. Chacun, dans l'entourage, contribue. Dans la manière de favoriser un climat encourageant, attentif. C'est une lutte. Heureusement, le film ne suit pas un scénario traditionnel. La narration est faite de moments successifs, elle tend à fixer une énergie positive, celle qui consiste à se transformer pour se rapprocher des autres, revenir dans leur vie. C'est le devenir de cette énergie qui compte, pas de savoir si René va retrouver sa compagne dans l'histoire. Le personnage rayonne d'une dynamique de "remise en forme" dans tous les sens du terme. Il n'y a pas de compassion, pas de dramatisation, pas de comédie autour de l'obésité. Pour éviter la théâtralisation du "gros", Cavalier a choisi une forme très documentaire. Dépouillée mais stylée. L'approche, non conventionnelle, développe un regard très riche. Sympathique, nageant vers le bonheur, René ressemble de plus en plus à un porte-bonheur, une baleine blanche.
(Pierre Hemptinne, Charleroi/Mons)