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Pointculture_cms | critique

AMBER

publié le

Après un premier album qui compilait leurs débuts, Autechre revenait avec Amber, un disque beaucoup plus cohérent, mais surtout qui marquait le passage vers une musique plus ambitieuse, plus complexe, qui, sans réellement exiger une attention […]

Contrastant avec la musique électronique de l’époque, orientée vers le dancefloor, et réalisée dans un esprit éphémère, immédiat, le disque, quoique enregistré en quelques mois, a bénéficié de la production minutieuse qui caractérisera l’ensemble de la carrière du groupe. S’il conserve encore des traces de la techno et de l’acid-house qui ont constitué la bande-son des raves de l’époque, l’album a rapidement montré qu’il était tout autant prévu pour le live que pour une écoute « domestique ». Ses rythmes complexes, riches de ses couches multiples de percussions, lui assurent une relative efficacité, mais le but est ici tout autre et l’accent est mis bien plus sur les climats que sur une invitation à la danse. De la même manière qu’en marge des concerts ou des mix plus directement dansants une place nouvelle était faite à une musique plus ambient, plus contemplative, l’album sera considéré comme un des meilleurs représentants de ce qui allait devenir l’IDM, l’intelligent dance music, un terme malheureux recouvrant un pan de la musique électronique qui ne masquait pas ses origines dans la musique des clubs et des free-parties mais se destinait à une nouvelle forme de consommation, plus méditative, moins immédiate, mais aussi parfois plus cérébrale. Si Autechre ne s’est jamais clairement senti en phase avec cette définition, souvent empreinte d’un certain manichéisme qui séparait les aspects physiques, faisant appel au corps plus qu’à l’esprit, d’une vision décrétée supérieure de la musique « à écouter », leur musique sombre, plus exigeante, ou simplement plus abstraite, a réussi à introduire la techno auprès de gens rebutés auparavant par le coté brut, direct, charmeur mais périssable, de la dance, ou par ses dérives trop commerciales. Elle a initié aux sonorités électroniques et au potentiel de ces nouvelles musiques des gens, amateurs de rock ou de musiques plus expérimentales, qui jusque-là établissaient une frontière étanche entre des genres considérés comme sérieux, et le monde de la pop ou de la dance, rejetés comme frivoles, passagers et sans réel intérêt pour le connaisseur digne de ce nom. Une génération de mélomanes qui n’aurait jamais mis les pieds dans une discothèque trouvait là un terrain d’entente avec ceux qu’avait séduit l’acid-house, la techno, ou le hip-hop. Autechre établissait non seulement une passerelle entre des genres jusque-là jalousement cloisonnés mais aussi entre des publics alors strictement antinomiques. Rétrospectivement, Amber est sans doute un des albums les plus accessibles, les plus mélodiques, d’Autechre. Le groupe s’orientera ensuite vers toujours plus de complexité, mais Amber reste une pierre blanche dans leur carrière comme dans l’histoire de l’électronica.

Benoit Deuxant

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