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Pointculture_cms | critique

ZENNEGAT

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Douze plages de bandonéon solo avec, ici ou là, l’évocation vocale d’un fantôme et pas l’ombre d’un tango. Le pays est tout autre. André Goudbeek ne se laisse pas enfermer, il ouvre grand les écluses de ses soufflets. Il épouse la large amplitude de […]

Douze plages de bandonéon solo avec, ici ou là, l’évocation vocale d’un fantôme et pas l’ombre d’un tango. Le pays est tout autre. André Goudbeek ne se laisse pas enfermer, il ouvre grand les écluses de ses soufflets. Il épouse la large amplitude de l’instrument, son extrême souplesse, pour s’engouffrer dans des jeux sans contrainte. Puis il dresse des obstacles, invente des règles temporaires, des contrôles, des rigidités, des canalisations. Il organise des rétentions, des bassins de décantation. Musique très architecturée qui ensuite s’effrite, se fait totalement invertébrée, rampante, stagnante. L’inspiration, le débit et le phrasé varient selon l’évaporation, les nuages, les précipitations, les infiltrations, les percolations. Un cycle patient. Ça sent le marcheur, l’arpenteur des champs et des berges, le grimpeur des coteaux céréaliers, le rêveur des bosquets. Respiration scandée de la montée, souffle ample et fluide face au panorama, rythme cardiaque contemplatif. Les soufflets intériorisent les paysages familiers du musicien, environnement vital. On sent que Goudbeek a souvent travaillé avec des peintres, des poètes : son verbe musical est plastique, coloré, expressif, de trame abstraite avec des motifs figuratifs. La musique pense comme coule une rivière. Ou l’inverse : la musique coule comme pense la rivière. Jeu de miroirs. Le dernier CD de Goudbeek parle de la Senne. Seule rivière qui traverse nos trois régions politiques ! Une rivière malmenée par l’essor industriel, l’exploitation du sol, la pollution cynique. Elle fait l’objet d’un travail associatif intense pour lui rendre son état de rivière vivante. La rivière intérieure du musicien, bandéonisée, parle des mêmes choses : la fragilité, l’aliénation, les errements, les méandres pour conserver sa dignité… Est-ce du jazz pour un « CD du mois » ? C’est de l’improvisation en tout cas ! Par un jazzman belge d’envergure internationale, historiquement incontournable. Il a joué avec John Tchicai, le légendaire Chris McGregor’s Brotherhood of Breath, Willem Breuker, Fred Van Hove, Peter Kowald… Une pointure capable de simplement cueillir une « Valse à l’improviste » dans les rapides d’une cascade…

 

PH

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