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Pointculture_cms | critique

TROPICAL MALADY

publié le

Tropical malady pourrait être un rêve. De ceux trop beaux,

Tropical malady pourrait être un rêve. De ceux trop beaux, qui disparaissent avec l'aube en laissant au cœur et à l'esprit des marques indélébiles. Ceux-là même qui, fantômes voluptueux sortis du passé, ensorcellent notre présent. Un de ces rêves qui s'admirent, se laissent contempler et écouter surtout.
Construit comme une suite de deux moyens métrages distincts, mais intimement liés, Tropical malady déroute. La première moitié du film nous raconte une histoire d'amour. Simple et pudique, elle unit deux hommes tout au long de scènes filmées avec sincérité et légèreté. Le réalisateur procède par petites touches, peignant un désir naissant en toute candeur. Puis survient la coupure. Nette. Un fondu au noir, préfigurant la seconde moitié de ce diptyque, nocturne et ténébreuse, marque le coup. L'histoire se retourne, laissant maintenant apparaître au spectateur sa face cachée et subconsciente. Quittant le monde sensible, Apichatpong Weerasethakul change de ton, de mode narratif. Il change de film. La voie de l'esprit nous immerge en plein inconscient qui se veut l'écho suprasensible de l'histoire initiale. Narré à la manière d'un film muet - ce qu'il est au final -, ce conte séculaire explore l'âme humaine à l'état sauvage. Affranchie de tout ornement civilisé - à commencer par le langage -, elle se retrouve face à elle-même. À la fois proie et prédateur. La jungle devient alors un lieu de perdition, absorbant le héros dans les spectres légendaires de ses croyances. Au bruit et artifices de la première heure du film, le réalisateur substitue le bourdonnement hypnotique et régulier de la nature et de l'obscurité.
Deux heures, deux films, pour deux approches et deux modes de perception. Fleuron d'un cinéma qui n'a pas fini de surprendre, Tropical malady restera une œuvre singulière, à la fois contemplative, envoûtante et lascive.
(Michaël Avenia, Liège)


Il était une fois, au royaume de Siam, deux beaux jeunes gens s'aimant d'amour tendre… Un sort funeste les attend ! Une patrouille de soldats forestiers découvre un cadavre, se fait joyeusement photographier à ses côtés… et le ramène au village en devisant gaiement. À la lisère de la jungle court un homme nu…
Scènes de la vie familiale à la campagne, vie quotidienne ville-campagne, collages d'images fugaces en une succession non-événementielle, à première vue non signifiantes. Un jeune soldat noue une amitié amoureuse avec un jeune paysan. L'existence s'écoule douce et calme. Une chanteuse d'âge mûr, en robe de diva, susurre une chanson d'amour… Entrelacs de douceur, de sentiments tendres, de gentillesse, de plaisir, de sensualité un peu mièvre. Long fondu au noir. Fin du premier chapitre.
Deuxième partie, inspirée sans doute d'un conte traditionnel. Une bête étrange et cruelle, sorcier réincarné en tigre, capture du bétail qu'elle dévore. L'ami paysan disparaît. Le soldat pénètre dans la forêt hantée de cris et de lueurs étranges. Commence une chasse fascinante, hypnotique, dans les jeux d'ombres hantées de peurs, les reflets métalliques du vert décliné à l'infini, jusqu'à devenir le miroir du monde magique, le labyrinthe d'une quête « mystico-religieuse » absconse, muette.
L'histoire, dite en voix off, est soulignée par le langage ésotérique d'un singe, porte-parole de la forêt, qui informe le héros épouvanté du sort qui l'attend. Tigre, magie « chamanique », homme tatoué en tigre, homme-tigre, amant, esprit de la nature, hallucinations métaphysiques d'un esprit drogué de fièvres, langueurs moites… tropical malady.

PC

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