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Pointculture_cms | critique

BLASÉ

publié le

Il règne sur cet album une atmosphère lunaire, désertique. Le corps sonore, homogène et complexe (Philly Joe Jones et Malachi Favors constituant pieds et jambes, Dave Burrell la colonne vertébrale, Shepp, Lester Bowie et Chicago Beau les bras tendus […]

Il règne sur cet album une atmosphère lunaire, désertique. Le corps sonore, homogène et complexe (Philly Joe Jones et Malachi Favors constituant pieds et jambes, Dave Burrell la colonne vertébrale, Shepp, Lester Bowie et Chicago Beau les bras tendus et la voix diaphane de Jeanne Lee, la tête) halète et sautille en une traversée se déclinant en différents actes. Chaque musicien menant initiatives et détours, la musique prend allure de virée erratique dans le no man’s land de ce qui allait bientôt constituer le « style » d’Archie Shepp, entre expérimentations radicales et classicisme kitsch.
Son saxophone authentifie tout, va au plus près de l’essence. Il dénude, gratte, s’enracine dans une atemporalité qui n’est pas celle de l’intellectualisme, mais celle de la réalité tangible, palpable d’un homme, d’un peuple en souffrance et révolte. Les extravagances en tout genre se légitiment au sein d’une démarche dont le fondement est l’authenticité: ne rejetant aucun penchant, que celui-ci tende vers une abstraction abrasive comme vers un morceau aux relents de comédie musicale.
À ce titre, Blasé est emblématique.
On retiendra évidemment la reprise du standard Sophisticated Lady, qu’affectionnait plus que tout Billie Holiday, magnifiquement servie ici par le dialogue sax/voix (rappelant étrangement la complicité qui régnait trente ans plus tôt entre la diva Holiday et Lester Young).
Comment ne pas être touché par le morceau éponyme, mi-chanté, mi-scandé par une Jeanne Lee décidément au summum de son art, maniant cris et chuchotements en un même discours musical suave et précieux ?
Comment enfin ne pas être frappé par l’élégance, la grâce qui se cachent derrière chaque silence ? À l’affût, à l’écoute, celui-ci, bien présent, rebondit et se charge de fureur. De fureur et du respect de l’autre. D’une fureur constructive, d’une utopie presque.
Ce disque, enregistré en France par des musiciens noirs américains, clame la mort et le renouveau, il porte en lui une énergie et un apaisement dont le groupe est la synthèse : requiem contemporain de l’homme nomade, exilé dans un coin du monde qui n’est pas le sien, dans un coin du cerveau qui est celui de la vérité et de la déraison.
Michel Coton

 

 

Si la musique de Supersilent reste aussi surprenante après quatre albums et neuf ans d'existence, c'est peut-être parce que, de leur propre aveu, ils ne répètent jamais ensemble, ne composent jamais leur musique à l'avance et ne font globalement que ce qu'ils ont envie de faire. Chacun des membres possédait déjà une pratique de l'improvisation bien établie, et ce, avant la formation du groupe en 1997, lorsque le trio de jazz Veslefrekk invite Helge Sten à se joindre à eux sur scène, pour un soir croyaient-ils. Ce dernier, qui connaissait déjà un certain renom au sein de la scène électronique sous le nom de Deathprod, va apporter au trio ses machines et une certaine ampleur sombre. Un pied dans le jazz, un autre pied dans le rock et, étrangement, un troisième pied dans l'électronique, c'est depuis lors la recette de Supersilent, quartet dont la musique est pourtant en marge de ces trois courants. Leurs longues improvisations peuvent rappeler la période électrique de Miles Davis, voire les climats d'un Pat Metheny ou de leur compatriote Terje Rypdal. Les manipulations électroniques des instruments peuvent les tirer vers une certaine avant-garde "bruitiste", l'ampleur de leur musique les rapprocher d'un King Crimson, ce ne sont jamais que de fausses pistes, puisque de toute façon, ils n'en font qu'à leur tête, d'un album à l'autre, d'un morceau à l'autre, d'un concert à l'autre.
Benoit Deuxant

Discographie sélective :

- Supersilent 5 - US9542
- Supersilent 6 - US9543
- Supersilent 7 - US9544 (DVD)
- Deathprod : Deathprod XD254J (coffret 4 CD)
- Deathprod : Morals and Dogma - UD2970

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