CAFÉ DE L'INDÉPENDANCE
Abdelaziz Bekhi, c'est Baâziz et Café de l'indépendance
, son dernier album. Petit clin d'œil aux cafés apparus un
peu partout en Algérie après la guerre d'indépendance où
il était bon de débattre politique. On l'aura compris, Baâziz,
est un chanteur engagé, contestataire.
Au-delà de ses merveilleuses mélodies, des rythmes entraînants,
ce sont ses mots qui nous touchent le plus, ils atteignent leur cible en plein
cœur. De sa belle voix grave, il nous chante une Algérie bafouée,
épuisée, qui se relève péniblement des corruptions
de son régime.
Baâziz poursuit une tradition qui consiste à détourner un
chant du répertoire classique et à en faire une version corrosive.
Il dénonce de cette manière, les injustices sociales et politiques.
Le titre Dès que le vent soufflera de Renaud devient Nous
nous en allerons aux vers… pas piqués des vers. Fan du chanteur
français, ce n'est pas la première fois qu'il reprend et adapte
un des ses morceaux, L'Hexagone devient Je m'en fous, que
l'on peut entendre en version française ou algérienne sur son
précédent album Dorénavant... ça va être
comme avant ! (mais aussi en plage
cachée sur Café de l'Indépendance ).
Ce fut Ksentini Rachid (1887-1944), comédien talentueux et populaire,
aussi prénommé « le charlot algérien »,
qui usa de ce style appelé « maâkous ».
Avec ses jeux de mots, ses chansons accusatrices, Baâziz nage en eaux
troubles. La censure, telle une épée de Damoclès suspendue
au-dessus de la tête, ne l'arrête pas. Il ira jusqu'à interpréter
en direct, à l'insu des programmateurs, Waïli Waïli,
un morceau censuré ! Courage ne rime pas avec liberté, il
finit par s'exiler en France où il vit depuis 1998. Il rêve de
retourner à Cherchell, petite ville près d'Alger, où il
est né il y a une quarantaine d'années. Cependant, où qu'il
soit, il continue à prendre position et à revendiquer toujours
plus haut, toujours plus fort !
(Magda Ettalibi, Charleroi)