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Pointculture_cms | critique

GREATEST HIT [MONEY MOUNTAIN] (THE)

publié le

Mark E. Smith, le leader omnipotent de The Fall, partage avec le réalisateur Robert Bresson la faculté rare d’user des corps de ses modèles (acteurs pour l’un, musiciens pour l’autre), de les fondre dans son dispositif, le plus souvent, pour un usage […]

Mark E. Smith, le leader omnipotent de The Fall, partage avec le réalisateur Robert Bresson la faculté rare d’user des corps de ses modèles (acteurs pour l’un, musiciens pour l’autre), de les fondre dans son dispositif, le plus souvent, pour un usage unique et exclusif. Et bien rares sont ceux qui, abandonnés ensuite à leur destinée par le sardonique contremaître mancunien, ont pu retrouver un quelconque débouché musical. À ce titre, la brève mais intense carrière des Blue Orchids, n’en est que plus remarquable. Formé en 1979 par deux membres fondateurs et éphémères de The Fall, Martin Bramah (guitare et chant) et Una Baines (claviers), le groupe ne prendra véritablement corps – si l’on peut dire – qu’après une année sabbatique, douze mois ponctués d’expériences hallucinogènes au cours desquels Una Baines soutiendra n’avoir jamais dormi ! Fasciné par la contre-culture et le psychédélisme, le duo façonnera une musique inhabituelle pour l’époque. Alors que nombre de leurs congénères post-punk se préoccuperont de se trouver une esthétique musicale sèche et froide au diapason de leurs revendications politiques (The Pop Group, Gang Of Four), les Blue Orchids, en insolites ‘northern freaks’ post-industriels, tenteront, quant à eux, de lier discours anti-thatchérien et retrait du monde par le biais de l’illumination transcendantale. Un orgue synthétique aux mélodies obstinées et entêtantes, une voix en élévation permanente, défoncée par manque d’oxygène: la recherche d’état second s’accomplit au travers d’un cérémoniel bancal tout à la fois de facture pop et proche des élucubrations spiritualistes d’un Alejandro Jodorowsky. « I spent a year with no head/Not a care in the world/My feet did the walking/My hands did the talking » entend-on sur A Year With No Head.
Le présent album rassemble idéalement toutes les traces des plus riches heures des Blue Orchids : celles s’étendant de 1980 et des premiers 45t du groupe (dont certains produits par Mayo Thompson) à son premier album The Greatest Hit (Money Mountain), un disque édité par le label Rough Trade et qui connut à sa sortie en 1982 un modeste succès. Par la suite, le groupe accompagnera sur disque, en tournée (et parfois dans les gouffres) la chanteuse Nico, il se séparera, se reformera épisodiquement, Martin Bramah réintègrera également The Fall en 1989 et en 1998. Des « hopeless people » (selon les termes persifleurs employés par M.E. Smith) voués à la déveine et à une relative indifférence de la part des Officiels du Rock, mais qui ont pris le risque, avec leurs maigres moyens, de s’inventer un pays musical inédit, entre paysages charbonneux et rêveries psychédéliques. [retour]
Jacques De Neuville

 

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