YOUNG ADAM
Jeune vagabond sans ambition, Joe trouve du travail à bord d'une péniche.
Il y mène une vie terne, s'abandonnant sans retenue dans la relation
adultère qu'il entretient avec la femme de son patron. Mais la découverte
d'un corps dans les eaux du canal va réveiller chez le jeune homme les
souvenirs d'un passé troublé. Construit autour d'une narration
fragmentée en flash-backs, ce film plonge le spectateur dans cette É
cosse prolétaire des années cinquante, aux couleurs froides comme
les eaux qui engloutissent un à un les souvenirs de Joe. Avec l'oubli
comme seul exutoire, l'abandon comme seul but, il mène sa vie comme beaucoup
d'autres de ses contemporains : avec lâcheté, sans aucune
envie de responsabilités. Prisonnier de cet univers morose, de son existence
aseptisée, il cherche à fuir son passé, son présent.
Il cherche à se fuir lui-même. Comparable sur bien des points à
l' É tranger de Camus, cet anti-héros nous
fait redécouvrir son passé trouble en questionnant l'inconscient
collectif… car si certains choix ou réactions peuvent sembler familiers,
il en est d'autres qui nous dépassent. Soutenu par une photographie inquiétante
et bercé par une lumière crue, ce film dérange et induit
au dégoût. Brillamment interprété par un trio d'acteurs
convaincus – Ewan McGregor en tête – cette première
réalisation laissera les traces d'un malaise perceptible auquel l'érotisme
glauque et la violence latente ne sont pas étrangers.
(Michaël Avenia, Liège)
Les années 50, une Écosse brumeuse et grise. Les et Joe, deux
mariniers, découvrent le corps d'une jeune femme dérivant sur
l'eau. Suspecté, le petit ami en date est arrêté et l'enquête
suit son cours… Joe semble néanmoins tourmenté par la tournure
des événements. Aurait-il un lien avec la noyée ?
Le personnage principal interprété par l'acteur caméléon
Ewan MacGregor est complexe. Ce jeune homme ambigu, constamment insatisfait,
représente le parfait anti-héros qui se perd dans les méandres
d'une vie ennuyeuse. Ses comportements tour à tour lâches, distants,
le rendent difficile à cerner. À coups de flash-back réellement
réussis, de corps à corps tristes et crus, de silences lourds
de sens, une vérité sordide apparaît. Pour accompagner brillamment
ce film, saluons la B.O. Lead Us not into temptation (
). La musique, envoûtante et mélancolique, composée
par David Byrne, est en grande partie instrumentale, hormis deux morceaux chantés
par lui-même. Les nombreux intervenants sont tous Écossais (Mogwai,
Belle & Sebastien…). Le film de David Mackenzie est l'adaptation fidèle
du roman homonyme de l'auteur écossais Alexander Trocchi. Écrivain
maudit, torturé, qui évoque une société réprimée,
hypocrite, prompte à juger sévèrement. Le réalisateur
rend un bel hommage à l'écrivain, mort en 1984. Young Adam
est une œuvre fascinante, à voir tout simplement.
(Magda Ettalibi, Charleroi)