Le Japon aime pratiquer les grands écarts, notamment en musique, reconnu pour ses multiples diversions musicales, des plus indigestes au plus extrêmes. Entre autres, une multitude de groupes composent une scène parallèle, alternative, incroyablement ouverte et unique. A l’instar des brésiliens, friands de «tout», ils ont cette faculté de s’imprégner d’une multitude de styles, de les apprivoiser et de se les approprier. Boredoms, Ruins, Bondage Fruit, Merzbow, Acid Mothers Temple, After Dinner, Hoppy Kamiyama et Otomo Yoshihide en sont quelques illustrations sonores.

Au même titre, Rovo incarne cette touche nippone de sa musique littéralement progressive:  ce sextet déploie de longues et puissantes suites incandescentes alimentées par les coups d’archet du violoniste Katsui Yuji, la polyrythmie incendiaire des percussionnistes Okabe Yoichi et Yoshigaki Yasuhiro, les claviers acidulés de Nakanishi Koji et Masuko Tatsuki, les volutes dub du bassiste Harada Jin et les accords lunaires du guitariste Yamamoto Seichi.Ce double album live nous fait passer un moment inoubliable d'extase volumétrique !  

Ou encore le trio féminin Hoahio avec Haco, Sachiko M et Yagi Michiyo, qui entrelace, voix, koto (instrument traditionnel japonais), bruits divers et percussions pour délivrer des sucreries « pop», décalées et malicieuses. Quant à Haino Keiji, il oeuvre pour d'étranges cérémonies où se mêlent mur de guitares, voix fantomatique, cris stridents et les roulements de tambours frénétiques de Yoshida Tatsuya, maître incontesté des baguettes !

Ailleurs, la voix de Tenko et les percussions électroniques de Ikue Mori s’associent au sein de Death Praxis et retentissent dans une déferlante de sons et de poésie orchestrale, puisant dans le creuset ethnique mondial et le métamorphosant en un folklore naissant.

Jérôme Vermeille, médiathécaire de Blois