DIMITRI
Qui l'a vu en scène sait qu'il n'en sort pas indemne. Ce félin funambule investit l'espace à pattes de velours. Muscles tendus, retenus, visibles sous son torse nu. Il s'offre, avec comme seule distance, comme ultime pudeur, entre vous et lui, l'opaque de ses lunettes noires. Il se pose, s'affole, martèle ou caresse ses pianos. Droits ou à bretelles, il y arrime son univers d'écorchures pansées au blues de ses humeurs tendres et rageuses. Ses chants douloureux sont presque primaux. Qu'il vous les confie ou vous les gueule, ça ‘uppercut'. Fustigeant, de sa voix râpeuse, avec générosité les mochetés de la vie, le consumérisme, l'abêtissement volontaire d'une société en mal d'air. Oscillant entre bluesman, crooner, gouailleur et même chanteur de variété. Futile ou grave, il magnétise l'atmosphère. La ventile à grands coups d'émotion en rupture de ton. De la profondeur dans son fourreau de tendresse, d'humanisme, d'humour.
(Brigitte Lebleu)