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Pointculture_cms | critique

CONCERTO VIOLON 1 [+ BARTOK: CONCERTO VIOLON 2]

publié le

Surprenant à la première écoute, ce disque ne se laisse pas facilement apprivoiser. Deux compositeurs atypiques et deux pièces peu représentatives de leur œuvre, dans

 

 

 

Surprenant à la première écoute, ce disque ne se laisse pas facilement apprivoiser. Deux compositeurs atypiques et deux pièces peu représentatives de leur œuvre, dans
les mains fines et vigoureuses d’un jeune violoniste belge. Tant mieux si c’est bizarre: l’insolite réclame une écoute dynamique qui dévoile toujours un petit coin de paysage inattendu, un élément que l’on ne retrouvera peut-être plus, mais dont le souvenir rendra la prochaine écoute encore plus excitante.

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Soit, le violon n’est pas leur instrument de prédilection, pas plus que le concerto leur forme favorite. Bartok, qui aime les percussions, n’est jamais aussi spectaculaire qu’au piano; Chostakovitch, fidèle en apparence aux dictats du réalisme-socialisme, se consacre principalement à l’art monumental de la symphonie. En retournant les choses de façon un peu perverse, on imagine que rien n’est plus jouissif qu’un artiste dans une position d’inconfort. Dans ces circonstances, sa maladresse pourrait nous révéler ce que sa maîtrise généralement nous dissimule, quelque aspérité plus intrigante, plus révélatrice de son véritable caractère que ses chefs d’œuvre… Ceci est surtout vrai pour Bartok, que l’on découvre ici étrangement brouillon. Ce concerto pour violon (quasiment unique dans son œuvre, puisque le premier, composé dans sa jeunesse, il l’a démantelé après avoir été sentimentalement déçu par son inspiratrice) est un fourre-tout! Thème, variations, accords et désaccords: les divers éléments se suivent, se répètent, s’éparpillent comme des morceaux de verre, cassant le rythme, bousculant l’émotion, précipitant des chutes qui n’arrivent jamais. Et cependant, cela s’écoute avec plaisir, l’esprit en éveil, musique anti bruit de fond par excellence, pourvue de fils conducteurs multiples et de fausses pistes bien acérées. Après trois mouvements d’instabilité, Chostakovitch semble plus sage que de raison. Encore une rupture de ton! Méfions-nous: le compositeur, qui toute sa vie dut composer avec la censure et les récriminations du pouvoir, était un excellent prestidigitateur. Ici les grands airs pour secouer la veine patriotique du bon peuple, là sur les côtés les ruissellements discrets d’une sensibilité dont la présence, quoique discrète, creuse et sculpte la matière d’une façon inavouable. D’ailleurs, âme contrastée – n’est-ce pas ainsi que se définit l’âme russe? Pour un scherzo exalté, une passacaille pose quelques minutes de langueur aussitôt rattrapée par un burlesque endiablé! Enfin, pour lier ce parcours tumultueux, rien de tel qu’un jeune archet, du bois encore un peu vert, fougueux mais vulnérable, capable de relever les défis, techniques autant qu’émotionnels. Né à Anvers en 1986, second lauréat du Concours Reine Elisabeth en 2005, (où il a d’ailleurs proposé le premier concerto de Chostakovitch), Yossif Ivanov, qui doit encore se constituer un répertoire, n’est pas sorti de la coquille des «premières fois». Aussi, avec lui, ces deux concertos, pourtant maintes fois immortalisés (Stern, Perlman, Menuhin, Oistrakh, etc), ne sont pas tout à fait les mêmes, plus vifs, nerveux, impatients: une effervescence qui s’accorde à merveille avec ces trépidantes partitions.

Catherine De Poortere

Liens supplémentaires :
Lien 1: Concerto pour violon de Bartok: autres interprétations
Lien 2: Concerto pour violon de Chostakovitch, autres interprétations
Lien 3: Discographie de Yossif Ivanov

 

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