RAG-TIME
Donc, au début, cet album de Dominique Grimaud, c'est bien du ragtime
(fin XIX e siècle) qui délire et qui dérape à travers
les sillons écorchés de vieux vinyles. Sucré glacé
au Moog synthétiseur (pionnier de la musique synthétisée
mi-XX e siècle). Vinyles accélérés avec les doigts,
hachurés par le temps, sautillants comme un vieux Charlot .
Courbes de Moog fondues, tordues, louchant comme un facteur bitu dans Jour
de Fête. Une belle grosse guitare Fender Stratocaster Wha Wha évoque
un passé plus proche encore; les époques musicales se chevauchent,
Jelly Roll Morton succède à Led Zeppelin, John Fahey précède
Mozart… Le temps est déchiqueté avec beaucoup de style,
de respect, d'humour et de technique. Quelques pédales, des effets, saugrenus
en effet, et les blues se désarticulent, les guitares hawaiiennes s'amollissent,
toute une basse-cour de sons polissons se rappellent à notre bon souvenir.
Voici une poésie musicale plus amusante que savante, quoique, c'est égal,
mais sans mauvaise prétention. Je ne résiste pas à l'envie
de citer deux titres de l'album : Toamajoa et Le Pipizizicacatoto
de cucubaba . Et puis dans la liste des remerciements, rapprocher Jacques
Prévert et Otomo Yoshihide, cela donne envie de rencontrer le bonhomme.
( Pierre-Charles Offergeld, Liège )