Le lit descend dans la neige tiré par une camionnette vers… un enterrement, des pleureuses, des musiciens. Solitaire, un homme parle sur la tombe de sa femme. Un chauffeur de bus chante Tombe la neige en français. Dehors, le froid, des hommes, un environnement déstructuré par la blancheur du paysage. Les habitants sont des silhouettes, comme des entités vagabondes. La vie de tous les jours est rude. Sans argent, règne une économie de subsistance où l'on vend à regret les souvenirs de famille. Au cimetière, un homme et une femme face à leurs conjoints défunts échangent des regards… Une valse-hésitation amicale s'installe entre les deux solitudes, des liens se tissent, une complicité amoureuse se noue…

Ce film plein de naturel, de spontanéité, d'humanité, est mis en scène dans un lieu déshérité d'Arménie. Là, l'espoir d'une vie meilleure, moteur des existences, interpelle sur le sort des ex-républiques soviétiques et de ses peuples délaissés par l'Empire communiste, tout en regrettant ce temps passé où « l'on vivait mieux ». Les acteurs très « natures », sont beaux dans leur sincérité touchante dénuée de pathos. Ils permettent de réfléchir à la richesse de leur vécu et au dénuement de leur présent. Très émouvant et sobre à la fois. On est loin des éclats flamboyants des films de Kusturica ! Plusieurs moments de mise en scène : la rencontre au cimetière, le voyage en bus, la réception de la lettre à Erevan, l'essayage de l'uniforme sur le marché, le lit qui glisse dans la neige…

PC