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Pointculture_cms | critique

SUNDAY AT DEVIL DIRT

publié le

A deux, il est toujours plus facile de conjurer la poisse !

A deux, il est toujours plus facile de conjurer la poisse !

Et si ce second volume des attouchements (purement) musicaux d’Isobel Campbell et de Mark Lanegan n’était pas tant un énième et facile succédané à l’antique fable de « La Belle et la Bête » mais davantage une relecture des termes de « l’échange » contenus dans l’inusable formule maritale : « pour le meilleur et pour le pire »... Déjà ils réclament leur couronne de laurier à parts égales alors que c’est elle qui se tape presque tout le boulot (écriture, production, arrangements) et que monsieur vient juste poser ses vocalises, caresser (mais à peine) sa gratte et se plier pour un court moment aux affaires courantes, promo, concerts (mais sans forcer) avant de prendre le large ou plutôt d’aller là où l’on l’appelle (et le paye). Car en solo, l’ex(pulsée) de Belle & Sebastian n’est pas une affaire qui roule. De gentils disques qui ne prennent pas suffisamment de distance avec ceux de ses anciens équipiers et qui surtout ne la placent pas en pô(u)le position des blondes qui papillonnent autour du folk (pop) avec de bons retours côté trésorerie. Quant à Lanegan, trop heureux d’endosser les frusques défraîchies avec application du rockeur baroudeur et maudit (presque un roman…), son parcours n’est pas non plus frappé de l’injuste opprobre divin que sa légende se plaît à écrire. Ancien leader des moyens Screaming Trees (grunge tendance psychédélique de la décennie précédente) et chanteur « dilettante » (ses 6 disques solos, plutôt « roots », sont d’honnêtes pioches), cet apprenti Tom Waits (comme tant d’autres) possède avant tout un carnet d’adresses à damner un martyr à la cause rock (la liste est longue). Voilà pourquoi notre homme pourrait passer des mois à jouer à rebours les confidents de l’inusable icône Kurt Cobain dont il était (bling bling) pote, s’incruster autant de temps qu’il le désire dans Queens Of The Stone Age ou camper ses interventions à des prestations VIP de porte-voix sympa mais précieux (Mad Season ou dernièrement Soulsavers). Mais là, il semble comme repris de fièvre créative en débarquant coup sur coup avec deux projets (provisoires ?). L’un, flanqué de son quasi alter-ego vocal Greg Dulli (feu Afghan Whigs, présent Twilight Singers) sous le nom évocateur de Gutter Twins et l’autre, avec le second tome de ses amours platoniquement musicales en compagnie d’Isobel.

« Sunday at Devil Dirt » redémarre là où « Ballad of the Broken Seas » avait stoppé le moteur. Un agréable mariage de contrastes nets - masculin/féminin, volcanique/marin, vieille carne/viande tendre, dépression/beau temps, chasteté/ivresse du péché, gosier sec/voix d’ange – qui ont pour cadre des chansons aux contours aussi sobres qu’étonnamment équilibrés, et dont le (parfois) discret calfeutrage de cordes ne vient jamais rompre la proverbiale simplicité. Les chasseurs de mythes hurleront avec les loups et disserteront à l’envi au bon souvenir des feulements tire-larmes dont était capable Lee Hazlewod pour les beaux yeux de son cheptel féminin, tandis que les ultimes romantiques rappèleront combien le trop discret ménage Dean Wareham & Britta Philipps est le couple glamour le plus mésestimé du monde.

À l’entame de « The Raven », on esquisse un sourire en imaginant un Léonard Cohen en pleine rechute hormonale tandis que « Who Built the Road » repose la question jamais tranchée de la nature exacte des épineuses relations entre Nick Cave et Kylie Minogue à l’époque de « Where the Wild Roses Grow ». Enfin, on cherche encore avec qui Tom Waits a poussé la chansonnette  pour inspirer un « Back Burner » (Scarlett, va coucher !) d’aussi mauvais augure ?

Le titre se termine d’ailleurs sur les mesures claudicantes d’un piano joué un peu de traviole. L’air se fait lourd et le temps comme les conversations virent à l’orage. Il y en a deux (?) qui n’ont pas fini de s’expliquer. Chouettes vacances en perspective…

Yannick Hustache

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