VIE COMME ELLE VA (LA)
Loin du cynisme de la ville, le film révèle la réalité
décalée d'un petit village de la campagne aveyronnaise habité
par une poignée de personnages hauts en couleurs reliés par un
même désir, celui de vivre proches de la nature, bien et librement.
À l'ombre du château médiéval de Najac, le chef de
gare s'occupe comme il peut entre deux trains, un poète de la mécanique,
amoureux de ses poupées, philosophe sur l'existence, « l'enfant
terrible du pays » pourchasse des brebis coriaces, des agriculteurs
fiers de leur métier produisent du bio, une centenaire acariâtre
pousse la chansonnette, un paysan fait son pain, une fermière passe son
coq à la casserole et le maire de 84 ans séduit ses électrices
à coup de saxophone…
Le point commun de tous ces Najacois, c'est qu'ils se contentent de vivre au
jour le jour sans se poser de questions. Disponibles, ils laissent les hasards
de la vie les conduire et les événements les dépasser.
Au bonheur de savoir se contenter de plaisirs simples, s'ajoute celui d'être
détaché du regard du voisin ou de la caméra. De cette alchimie
se dégagent des moments très drôles, touchants, aux allures
surréalistes.
Cependant, il ne faudrait pas réduire ce documentaire - qui par
ailleurs possède tous les attributs pour le qualifier ainsi - à
un témoignage simpliste de sociologie du terroir. Loin de vouloir creuser
le fossé entre la ville et la campagne, le réalisateur a voulu
mettre en valeur ce qu'aujourd'hui plus personne ne s'attarde à regarder,
la campagne, la nature mais aussi les personnes qui nous entourent. Tout en
réussissant à se faire oublier, il filme avec un regard léger
et bienveillant les choses comme elles viennent et les gens comme ils sont.
Ainsi, petit à petit, on s'attache à eux et on découvre
leurs faces cachées, leurs blessures, et au final, leurs raisons de vivre
et d'apprécier leur monde. Bien que vivant en apparente autarcie ou isolement,
ils ont chacun une philosophie de la vie et montrent une réelle ouverture
et une solidarité vis-à-vis du monde qui les entoure.
Avec une photographie et un son très soignés, Jean-Henri Meunier
signe avec ce film une très belle leçon de vie, un bouquet champêtre
d'humanité. Revigorant !
(Catherine Mathy, Dép. Fiction Documentaire)