Compte Search Menu

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies permettant d’améliorer le contenu de notre site, la réalisation de statistiques de visites, le choix de vos préférences et/ou la gestion de votre compte utilisateur. En savoir plus

Accepter
Pointculture_cms | critique

DEUX JOURS À PARIS

publié le

Au départ, des ingrédients puisés dans trois catégories : comédie romantique, film de voyage et parisianisme. Mais cela ne ressemble ni à When Harry met Sally, Voyage en Italie ou A bout de souffle. C’est que ce film contient aussi des crudités […]

 

2 days in Paris

Au départ, des ingrédients puisés dans trois catégories : comédie romantique, film de voyage et parisianisme. Mais cela ne ressemble ni à When Harry met Sally, Voyage en Italie ou A bout de souffle. C’est que ce film contient aussi des crudités salaces et un émulsifiant autobiographique, le tout agrémenté d’actualité politique. Le résultat ? Bien assaisonné, aigre-doux, légèrement piquant, suffisamment nutritif sans être diététiquement ennuyeux. Rien de novateur, mais un moment agréable dans la comédie française, comme l’année passée Prête-moi ta main, et, chez les Américains, Woody Allen - avant qu’il ne se mette à tourner des drames anglais.

Justement, Woody Allen est très présent ici, avec Adam Goldberg dans le rôle du Juif new-yorkais angoissé, hypocondriaque et (à juste titre) jaloux. Face à lui, la Française Julie Delpy (Marion), charnelle, libérée, très américaine finalement, tendance « girl next door », qui minore sa beauté derrière de grosses lunettes et un air faussement négligé. Faut-il le préciser, elle vit à Los Angeles depuis quinze ans… Les deux acteurs orientent leur personnage vers la caricature, infantiles et attachants comme des caractères de sitcom. De passage à Paris après un tour d’Europe, le couple se pose dans le studio de Marion, juste au-dessus de l’appartement de ses parents. Pratique : avant Valeria Bruni-Tedeschi dans Actrices, Julie Delpy fait jouer sa propre famille, clin d’œil plaisant pour un public qui n’aime jamais tant la fiction que quand elle lorgne vers le documentaire. D’ailleurs, la réalisatrice entretient volontiers cette ambivalence entre fiction et autofiction, jouant sur ses propres problèmes relationnels dans le milieu arty parisien dont elle se moque gentiment, confrontant pays d’origine et pays d’adoption avec la légèreté d’une apatride. Méchant ? Mordant ? À petits coups, les dents agacent sans faire de mal et les portes enfoncées sont déjà grand ouvertes : Bush, le racisme, les fast-foods, le tourisme sexuel, l’hygiène, la vanité de certains artistes – une revue de clichés abordés avec fraîcheur et ingénuité.

L‘incontestable parenté entre 2 days in Paris et Before Sunset, que Julie Delpy a également coécrit, rappelle encore Woody Allen qui, dans Melinda et Melinda, entreprend de parler de la même femme sous l’angle du drame et de la comédie. Suivant cette polarisation, les deux films de Julie Delpy mettent en scène un couple mixte franco-américain avec, comme outils narratifs communs, une fausse spontanéité, une improvisation simulée, et l’ambition réelle d’interroger la relation amoureuse. Malheureusement, c’est là que les deux films se heurtent à leur limite : les clichés envahissent le discours. Que ce soit dans le déroulement théorique de Before Sunset ou dans la mise en situation touristique de 2 Days, on ne dépasse jamais la surface, ce que reflètent ces couples, incapables de durer, qui confondent profondeur et complications psychologiques…

Restons-en à l’idée d’un agréable divertissement, ouvert sur la vie quotidienne, éclairage pittoresque sur des petits soucis qui ne sont peut-être pas les nôtres, mais tellement plus sympathiques : la substitution des uns par les autres s’opère inconsciemment, on se retrouve le cœur plus léger. Que demander de plus ?

Catherine de Poortere

 

 

flyer corps de ville

Après le coup d'essai en 2006, la section Architecture de l'ISACF La Cambre organise à nouveau sa biennale consacrée aux liens entre photographie et architecture. Le thème – volontairement ouvert et énigmatique - choisi pour cette deuxième édition est "Corps de ville". Vingt photographes, belges et français proposeront du 14 mars au 17 mai leur angle d'approche personnel de ce sujet.

Et pour la première fois, en collaboration avec les responsables cinéma (de fiction et documentaire) de La Médiathèque, les images en mouvement seront aussi convoquées au cours de deux soirées de projections, les 11 et 12 avril prochains.

Beppie Beppie


La Médiathèque, une ville dans la ville

Il ne faut pas chercher beaucoup pour trouver entre "Corps de ville" et "corpus de films", plus qu'une connivence de consonance, plus qu'un jeu de mots, aussi un jeu de sens. Que serait notre appréhension de la ville – celle d'aujourd'hui, mais surtout celle d'hier et d'avant-hier, celle du dix-neuvième siècle finissant puis de tout le vingtième, celle arpentée par Walter Benjamin, par Gene Kelly ou par Guy Debord – si le cinéma n'avait pas enregistré quelques traces de ses habitants ou mis en scène quelques-uns de leurs rêves ? Au début de 1896, un peu à l'étroit dans les paysages lyonnais, Louis Lumière recrutait par petite annonce des "jeunes gens n'ayant pas peur de l'aventure et d'un métier précaire" pour les adouber "opérateurs" et les envoyer de par le monde filmer des "vues" d'une cinquantaine de secondes chacune de Londres, Moscou, New York, Tokyo, Berlin, Chicago (et, même… Bruxelles). Cent dix ans plus tard, alors que, par la commercialisation massive de caméras digitales, de logiciels de montage sur ordinateurs personnels et de diffusion en ligne, le cinéma – ou une sorte de "post-cinéma" – est en train d'être soumis à la fois à de nouvelles libertés et à de nouvelles contraintes qui vont le tordre en une forme dont les contours à moyen terme restent difficile à prévoir, les médiathèques demeurent un lieu-clé à la fois de conservation et de diffusion populaire des traces, audio-visuelles et sonores, de la vie de quelques dizaines ou centaines de milliers de corps urbains, quidams et artistes professionnels, femmes et hommes, dont beaucoup ne sont aujourd'hui plus de ce monde. Dans un film de 2006 - qui sans être mauvais ne marquera pas l'histoire du cinéma, même s'il est porté à bout de bras par un acteur, Ben Stiller, qui, lui, restera dans la mémoire cinéphile comme un des corps emblématiques de l'Amérique urbaine de notre époque -, dans "Une nuit au musée", fable humoristique pour enfants petits et grands, une belle idée de scénario ramène à la vie, une fois la nuit tombée, tous les animaux empaillés, les mannequins de cire et les figurines miniatures des diaporamas du Museum of Natural History. Du musée à la bibliothèque et à la médiathèque, de l'une à l'autre de ces villes dans la ville, il n'y a qu'un pas, ou deux… Retrouvons quelques instants notre imagination enfantine pour visualiser un centre de prêt de La Médiathèque soumis au même scénario de résurrection nocturne…  Dylan croisant Chaplin, le jeune Antoine Doinel draguant l'hôtesse de bar japonaise de Shohei Imamura, Moondog affublé de son casque de viking chantant sur le Pont neuf de Leos Carax… Alors que des milliers, voire des dizaines de milliers, de médias de nos collections proposent des enregistrements de "corps de ville" qui ne demandent qu'à revivre, notre proposition de programmation en quatre séances et huit films est bien entendu ultra parcellaire. Il ne faudra donc y voir qu'une série de coups de cœur, de pistes effleurées et de portes entrouvertes… Avec l'espoir secret de vous donner l'envie de poursuivre la balade dans nos collections, de vous y aventurer pour prolonger votre propre histoire de "corps de villes", avec les corps et les villes, réels ou fictionnels, qui vous inspirent.


Beppie Beppie

Jeux de cinéma et apprentissages de la lucidité

Toute à l'heure, sur un trottoir de mon quartier, deux gamins turcs d'une dizaine d'années réinventaient sans le savoir le travelling avant et la caméra subjective au moyen d'un skateboard et d'une caméra de téléphone portable ! Il y a quarante ans, une petite fille de leur âge, issue d'une famille ouvrière de huit enfants, jouait d'autres jeux sur les trottoirs d'Amsterdam : jeux de cow-boys, le très Quick & Flupke "sonner-et-s'enfuir-très-vite-en-rigolant-très fort" et le plus mystérieux "jeu des marques de cigarettes"… Johan van der Keuken et son complice le photographe Ed van der Elsken [voir aussi les films de ce dernier] étaient là pour filmer Beppie, un peu à ses basques au grand air sur le pavé batave et beaucoup en chambre, en plans rapprochés sur son visage pour capter ses expressions et grimaces, tout en lui laissant le loisir de déverser à l'envi son flot d'histoires de petite citadine bavarde et malicieuse. En immortalisant cette gosse attachante, le documentariste qui trente ans plus tard, allait suivre la mobylette d'un coursier de labo photo à travers les différentes diasporas de la ville dans Amsterdam Global Village, fresque documentaire de presque quatre heures, filmait encore ici cet état de l'enfance où une certaine innocence et d'impressionnantes doses de lucidité se mettent à coexister. Beppie parle de la peur des hommes nus qui embêtent les petites filles dans les parcs, des femmes en bas résille dont les photos ornent les vitrines de drôles de commerces, des mains des vieillards qui rétrécissent et font mal et, beacoup, de sous, des 15 cents que coûte la piscine et des 29 florins qui seront sans doute hors de prix pour l'envoyer hors de la ville, en colonie de vacances, l'été prochain... Et sa mère à la toute fin du film de parler du mépris "des gens qui ont de l'argent" pour leur famille pauvre et nombreuse.

Ville, quartiers et corps socialBeppie

Parce que, comme la petite Beppie est sans doute en train de s'en rendre compte du haut de ses dix ans, en ville il n'y a pas que la jouissance très primitive et solitaire de son corps sous l'eau chaude de la douche de la piscine (splendide séquence !), il y aussi quelque chose que certaines grandes personnes appellent le corps social et qui s'avère profondément injuste et inégalitaire. Si dans Beppie, c'est au coin des phrases, presque dans les non-dits, que cette réalité de classes apparaît, dans le documentaire poétique "A propos de Nice" de Jean Vigo et de son comparse russe Boris Kaufman c'est au bord des images, aux collures entre les séquences, par le montage et dans l'entrechoquement des contraires ou des semblables, qu'éclate au grand jour la coexistence forcée, en bordure de Méditerranée, entre les plus nantis parmi les nantis et une classe travailleuse et meurtrie entièrement au service du farniente et des préoccupations m'as-tu-vu des premiers. Surgissement très bref, au milieu des images de grands hôtels, de hauts de formes, de caniches pouponnés et de parties de tennis très select, des mains et du visage complètement déformés d'un lépreux hagard. Ou collisions sarcastiques entre des images de coquettes en cols de fourrure et des plans d'autruches ou entre les visages grimaçants des géants d'un carnaval et un cortège funèbre. Vigo et Kaufman captent comme la prémonition d'une société irresponsable qui va à sa propre perte et ils en rendent compte par le cinéma, et rien que par le cinéma, sans paroles ni intertitres, comme d'autres grands films qui aussi en 1929, entre documentaire et expérimentation cinématographique, se font les sismographes de l'agitation des grandes villes : "L'Homme à la caméra", tourné à Moscou par Dziga Vertov (par ailleurs grand frère de Boris Kaufman) ou "Berlin : die Symphonie der Grossstadt" de Walter Ruttmann [jamais sorti en DVD en Europe ce dernier film n'est pas à La Médiathèque mais le curieux pourra se reporter sur son "Wochende [Week-end]" "film sans images", pour la radio, proposant un collage d'impressions sonores de Berlin le week-end, au début des années trente – X 041K et X 955S].

"L'ennui est le principal agent d'érosion des paysages pauvres"

En 1965, Maurice Pialat a déjà trente-cinq ans quand il réalise L'Amour existe, son premier court métrage. Son âge aide peut-être à comprendre en partie pourquoi son coup d'essai est d'emblée un coup de maître, d'une clairvoyance et d'une lucidité rares. En plans larges, souvent paysagers, Pialat filme cette sorte d'apartheid social et surtout culturel qui frappe la banlieue parisienne : les très inflammables bidonvilles en carton goudronné à trois kilomètres des Champs Elysées et ces (non-)lieux où "il ne fait pas bon de naître, quelques kilomètres à l'écart", où le déficit en jardins d'enfants et en terrains de jeux est de 99% et 75%... Les enfants et leurs jeux, dans les cages d'escaliers et les terrains vagues, sont d'ailleurs les seuls corps filmés avec une certaine proximité par son opérateur Gilbert Sarthre ; en ce qui concerne les adultes, ils sont plutôt filmés de loin, dans l'anonymat d'architectures qui les écrasent ou de foules marquées du poids du salariat ("La moitié de l'année, les heures de liberté sont la nuit. Mais tous les matins c'est la hantise du retard"), entassées dans les métros ou coincées dans les embouteillages. Pour filmer cette exclusion, ce hors-ville, "L'Amour existe" utilise à foison le hors champ, que ce soit par l'absence de voix in et l'omniprésence de la voix off ou par les contrepoints fréquents entre ce qui est dit et ce qui est – ou n'est pas – montré. Peu de temps après, quarante ans avant Fatih Akin (cf. ci-dessous), Maurice Pialat partira filmer ses "Courts-métrages turcs" à Istanbul. Et depuis quelque temps, à Paris, avec un même sens de la mélancolie, mais plus de rage et moins de tendresse mal cachée, Guy Debord s'est aussi mis à filmer des textes sur la ville ("C'était à Paris, une ville qui était alors si belle que bien des gens ont préféré y être pauvres, plutôt que riches n'importe où ailleurs. (…) La destruction de Paris n'est qu'une illustration exemplaire de la mortelle maladie qui emporte en ce moment toutes les grandes villes, et cette maladie n'est elle-même qu'un des nombreux symptômes de la décadence matérielle d'une société" ("In girum imus nocte et consumimur igni").


L'amour existe L'amour existe

The Sound of Music

Quand, dans "Crossing The Bridge", le cinéaste allemand d'origine turc Fatih Akin filme la si disparate mosaïque musicale d'Istambul, il met assez explicitement le doigt sur cette conviction qu'une ville silencieuse est un cimetière, une ville morte. Il nous permet de fermer la boucle de ce parcours thématique un peu labyrinthique et de "revenir à l'écurie", c-à-d. à La Médiathèque, là où sont disponibles sous formes de disques ces bandes-son qui depuis des siècles font danser, pleurer, survivre, se révolter ou se souvenir des générations de "corps de ville", citadins de longue date ou ruraux venus il y a peu s'y établir. Voir la ville c'est – aussi – savoir l'écouter.

 

PROGRAMME DES PROJECTIONS :

Vendredi 11 avril – 17h30 – Espace Architecture La Cambre – 19bis pl. Flagey - Ixelles

A PROPOS DE NICE / documentaire de Jean Vigo, France 1930
/ muet / sans intertitres / 23 min / BEPPIE / documentaire de Johan van der Keuken, Pays-Bas 1965 / v.o. néérlandaise s-t. Français / 36 min / L'AMOUR EXISTE / film-essai de Maurice Pialat, France 1961 / v.o. française 19 min


Sur un axe Nice-Paris-Amsterdam et au fil de trente-cinq ans d'histoire du cinéma, trois petites perles de cinéma documentaire en noir et blanc par trois cinéastes alors aux débuts de leurs parcours respectifs. Trois angles d'approches, explicites ou implicites, de trois réalités de fractures sociales urbaines… En 1930, alors que le cinéma hollywoodien chantait déjà le jazz depuis deux ans, Vigo et son opérateur russe Boris Kaufman ne font parler que les images dans ce film muet sans intertitres pour faire éclater à l'écran les inégalités entre nantis et laissés pour compte en bordure de Côte d'Azur. Au début des années soixante le cinéma a la possibilité d'être bavard. Il peut prendre la parole et, en voix off, mettre des mots calmes et lucides - mais acérés comme des couperets - sur l'exclusion sociale et culturelle des habitants de la banlieue parisienne. Il peut aussi écouter et donner la parole à une bavarde et malicieuse gamine de dix ans, issue d'une famille nombreuse des classes ouvrières d'Amsterdam.


Vendredi 11 avril – 20h30 – Espace Architecture La Cambre – 19bis pl. Flagey - Ixelles

CROSSING THE BRIDGE – THE SOUND OF ISTANBUL
documentaire de Fatih Akin, Allemagne-Turquie 2005
avec Alexander Hacke, Selim Selber, Müzeyyen Senar, Erkin Koray, Orhan Gencebay, Sezen Aksu... / couleurs / v.o. turque et anglaise s-t. français / 90 min

En 2004, Alexander Hacke, bassiste du groupe berlinois Einstürzende Neubauten, était déjà venu à Istanbul afin de s’occuper du son du film "Gegen die Wand" ["Head-On"] de son ami Fatih Akin. En 2005, les deux hommes y revenaient dans le but de dresser un inventaire kaléidoscopique, en sons et en images, des musiques de la métropole et de soumettre à l'épreuve de l'observation par l'œil et par l'oreille quelques clichés – forcément tout autant vrais que faux – sur son caractère de pont entre l'Orient et l'Occident. En suivant la grande silhouette dégingandée et séductrice du musicien allemand, de l'ancien quartier malfamé de Beyoglu aux palaces de quelques superstars et divas locales de la musique populaire – sans oublier un détour passionnant par la petite ville rom de Kesan -, le long d'un parcours musical mixant e.a. (post-) rock, hip-hop, fusion, dj's, musiques de rues ou de fêtes tziganes, complaintes kurdes et variété romantique, Fatih Akin prouve à qui en douterait qu'une ville sans musique ne peut être qu'une ville morte. Et – réciproquement – que dans une ville vivante, la musique est partout : activité commerciale florissante pour quelques-uns, arme de critique ou de survie pour d'autres, moins bien lotis, et partie intégrante de l'imaginaire urbain collectif pour presque tous.


Samedi 12 avril – 17h30 – Espace Architecture La Cambre – 19bis pl. Flagey - Ixelles

L'OCCUPATION DES SOLS / film-essai de Marie-Françoise Plissart, Belgique 2002
/ sans dialogues / 28 min / FLATLIFE / film d'animation de Joris Geirnaert, Belgique 2004 / sans dialogues / 11 min

Au début du vingt-et-unième siècle, la ville a changé. Elle ne ressemble plus ni à l'Amsterdam de "Beppie", ni à la Nice de Vigo et Kaufman. Un nouvel urbanisme est passé par là ; des tours ont poussé... La photographe belge Marie-Françoise Plissart (une des participantes à la précédente édition de la biennale "Photographie et architecture") s'y perche pour filmer la ville (Bruxelles) et ses habitants de haut, à leur insu, en respectant leur anonymat, non pas comme une caméra de surveillance mais plutôt comme un ange gardien. Le jeune animateur gantois Joris Geirnaert divise son écran en quatre et fait disparaître par la pensée la façade d'un immeuble d'appartements pour scénariser le petit théâtre des relations de voisinage de quatre de ses habitants. Filmé comme "en élévation", en deux dimensions, sans illusion de perspective ou de profondeur, le film joue sur le double sens de son titre: vie de flat, d'appartement / vie plate, sans relief.


Samedi 12 avril – 20h30 – Espace Architecture La Cambre – 19bis pl. Flagey - Ixelles

DOGVILLE / fiction expérimentale de Lars Von Trier, Danemark-Suède-France 2003
/ avec John Hurt, Nicole Kidman, Lauren Bacall, Harriet Andersson, Ben Gazarra… / v.o. anglaise / s.t. français / 178 min

Huit ans après la proclamation de la déclaration Dogma95 et cinq ans après "Les Idiots", le cinéaste danois Lars Von Trier s'attaque cette fois à une contrainte d'espace et de mise-en scène. Dans ce premier volet du triptyque "USA – Land Of Opportunities", l'action se déroule en 1929 dans une bourgade en périphérie d'une petite ville des Rocheuses. Le film est entièrement tourné en studio. Tant l'espace public (le croisement de quelques rues) que les maisons des personnages principaux, ne sont suggérés que par quelques meubles et accessoires très parcimonieusement choisis et par le dessin au sol de la limite des espaces et l'indication de leur dénomination, comme sur un plan de géomètre ou d'architecte – ou comme sur un plateau de jeu de société grandeur nature. C'est au milieu de cette sorte de huis clos ouvert à tous vents, aux murs transparents qui ne cachent rien, que se déroule le drame, assez brechtien, des relations troubles entre les membres d'une communauté qu'on dit "sans histoires" et une jeune fuyarde qui vient s'y réfugier et prend progressivement de la valeur – monétaire / échangeable – à leur yeux.


Philippe Delvosalle (La Médiathèque) – janvier 2008

Plus d'infos sur l'événement.


> à lire : "La Ville au cinéma" (ed. Cahiers du Cinéma, 2005)
Encyclopédie de 900 pages sur le sujet, abordé sous l'angle des genres et des écoles, des lieux et des personnages, ainsi que d'une soixantaine de villes significatives et de cinquante cinéastes urbains

.L'amour existe L'amour existe

 

YOURI NORSTEIN et LADISLAS STAREWITCH

norstein

C’est un monde étrange. On y rencontre des animaux, insectes, loup,

renard, hérisson, mais leurs contours adoucis, leurs traits expressifs, leurs yeux anormalement brillants, et cet univers particulier qui les environne, à la fois si naturel et féerique, ne ressemblent à rien de connu – ce monde n’est-il pas, plus qu’étrange, étranger? Ailleurs, le cinéma propose des effets spéciaux numériques vertigineusement réalistes, créant un monde où les éléments familiers se mélangent aux éléments virtuels sans qu’il soit possible de distinguer les uns des autres. Entre ces deux pôles de l’animation – irréaliste et réaliste – où se situe l’imaginaire?

En 1928, lorsque Ladislas Starewicz crée Les Contes de l’Horloge Magique, l’animation  relève de l’illusionnisme, composée de peintures, marionnettes, découpages - les possibilités ont la richesse infinie des arts plastiques combinés. Le créateur russe, récemment immigré en France, se passionne en outre pour l’entomologie. Aussi profite-t-il des ressources hétéroclites de l’animation pour mettre en scène sa ménagerie personnelle, petit peuple d’insectes et de créatures merveilleuses, minutieusement observées puis recréées. Démiurge d’une faune unique, Starewitch insuffle tant d’âme et de vie à ses créations que son public, certes peu aguerri, croit regarder de vrais insectes… Premier indice que l’imagination ne se nourrit pas de représentations photographiques.  On est encore très loin du réalisme maniaque de Fourmiz ou 1001 pattes.

starewitch

L’œuvre de Starewicz est celle d’un homme orchestre, tout juste assisté par sa famille proche. C’est également ainsi que procède  Youri Norstein. Plus tardif, il reste néanmoins fidèle aux techniques artisanales des premiers animateurs. Par principe.  Né en Russie en 1941, il y demeure encore, entièrement dévoué à son travail, sans grands moyens ni soutiens financiers. De film en film, avec son épouse, il tisse  une œuvre singulière, dont les motifs, puisés dans la peinture du début du siècle, composent, au travers d’une succession de panneaux transparents, une symphonie mémorielle incandescente.  Ebauches mélancoliques, ses courts métrages n’empruntent au conte que certains personnages et certains lieux, mais la forme en défait les conventions, dématérialise l’histoire apparente. N’ayant ni début ni fin, la structure du récit reste floue, parfois, comme dans Le Conte  des Contes, elle déroule des boucles temporelles. La clef est moins dans l’analyse discursive, la métaphore, que dans la perception intime, la mémoire.

La nature est la matrice de l’univers de ces deux animateurs. Multiple, changeante, tantôt maternelle et profuse, tantôt hostile, jamais elle n’apparaît réductible à l’homme. Si les animaux mis en scène par Starewitch et Norstein manifestent une sensibilité très humaine, ils n’en font que davantage ressortir l’ampleur souveraine de la forêt, indifférente à leur sort. L’approfondir, c’est risquer de se confronter à une solitude insoutenable. Un hérisson, chez Norstein, se perd dans une nuit brumeuse, ne reconnaît plus rien ni personne,  effrayé, fasciné, bientôt submergé par le désespoir. Ailleurs, un pélican et une cigogne n’ont d’autre alternative que de se réfugier l’un contre l’autre pour ne pas succomber à la solitude. Les dons et merveilles propres aux créatures de Starewitch s’épuisent en vain, s’ils ne sont pas partagés. Même ensuite, lorsque l’épreuve semble révolue, le spectre de la solitude semble encore peser sur tous ces personnages, les accompagnant à jamais comme une ombre. Nulle couleur vive, la palette de ces animateurs décline les tons feutrés, lavés, dégradés. La nuit offre un temps de prédilection pour le rêve et le souvenir, et lorsqu’une lumière vive surgit brusquement dans l’obscurité, son origine mystérieuse met son existence en doute. Les repères du réel effacés, tout questionnement semble révolu. Les personnages ont un regard  triste, résigné, mais ils conservent sans mesure une capacité d’émerveillement qui transcende leur mélancolie. Ces traits, naturellement, renvoient à l’origine russe de ces films, au traumatisme de la guerre très présent chez les deux auteurs, mais la transformation artistique efface toute référence précise, dont il ne reste qu’un état d’esprit, une rémanence universelle.  

Les univers de Starewitch et de Norstein reflètent un travail sur la matière, non sur l’image. La profondeur naît de l’utilisation de matériaux disparates, de mélanges insolites incrustés dans des écrans. L’illusion ne consiste pas à rendre cet univers réaliste, l’important c’est de lui donner vie, de lui donner une âme, comme le suggère l’étymologie du terme animation. Pourtant, ce n’est pas dans cette dynamique qu’elle a évolué. Aujourd’hui, l’essentiel de ces films exploitent les ressources du numérique, travaillant l’image seule dans le but fondamentalement conformiste de l’assimiler au réel. Or, l’imagination est la faculté de déformer les images, et c’est uniquement ainsi qu’elle exerce sur l’esprit sa fonction libératrice. Peut-être ces films spectaculaires nous impressionnent-ils intensément par leur perfection technique, mais l’hyperréalité qu’ils produisent n’est pas à même ne nous bouleverser, de nous déranger dans notre vision du monde, nous faire entrevoir l’infini de notre imagination.

Catherine De Poortere

A voir également, le beau documentaire Magia Russica, tableau général de l’histoire de l’animation en URSS.

 

BIG LOVE

Will SCHEFFER

 

biglove
          

 

Un homme – trois femmes. Une situation, sinon triviale, du moins  peu surprenante dans l’univers des séries qui, depuis Dallas et Dynastie, calque sa trame sur un réseau sophistiqué de liaisons amoureuses. Existe-t-il encore en ce domaine un tabou qui n’ait été envisagé? La réponse est apportée par Big Love: c’est la polygamie. Nous sommes dans l’Utah,bastion de la communauté des mormons, et les trois femmes sont trois épouses légitimes. Bien que cette secte ait officiellement renoncé à la polygamie en 1890, certaines branches dissidentes persistent dans ce mode de vie. Voici donc une famille hors-la-loi, vouée au secret, totalement dysfonctionnelle. Le «héros» de la série, Bill, est bon père de famille, honnête homme, travailleur, intègre, en un mot, conventionnel, à  la nuance près qu’il partage sa vie entre trois maisons (contiguës), trois épouses, une abondante progéniture.La marginalité renforce les convictions, se nourrit de fantasmes: le discours de Bill, sans être celui d’un fanatique, prend néanmoins l’accent inquiétant, délirant, d’une mégalomanie inavouée. L’homme se considère comme un pionnier, la dissimulation vis à vis de la société un sacrifice nécessaire pour les générations futures. La spécificité des séries produites par la chaîne privée HBO est de traiter les sujets les plus scabreux avec un naturel qui déjoue à priori toute tentative  critique: le quotidien d’une famille mafieuse (les Sopranos) ou celui d’une famille de croque-morts (Six feet under)  s’impose d’emblée sans questionnement, même si le scénario exploite ses particularités. Récupérant le procédé de la littérature fantastique, le traitement déceptif d’un événement extraordinaire, ce positionnement neutre, tout en instaurant un climat d’ambiguïté morale délectable, amplifie le sentiment d’étrangeté.

L’argument de la série est autant ethnographique que sociétal, sans que les deux aspects se contredisent. Car Big Love ne cherche pas à renouveler la thématique propre à la série familiale américaine. On y retrouve donc ce même fonds d’intrigues - rivalités, jeux de pouvoir, liaisons dangereuses - habilement agencé et toujours aussi efficace quand il s’agit de tenir le spectateur en haleine. C’est en soumettant tous ces clichés à l’anamorphose de la polygamie que la série se révèle subversive, bien plus que Desperate Housewives, qui se borne à  illustrer l’insatisfaction notoire d’un échantillonnage féminin conventionnel. Big Love agit par amplification du stéréotype: non pas une, mais trois épouses, amoureuses de surcroît, chacune incarnant un type de femme bien défini:l’intellectuelle, la manipulatrice, la femme-enfant. L’organisation de la vie quotidienne (partage des nuits, éducation des enfants, intendance, etc), la place que prennent la religion et la tradition,la fidélité, le désir: tout devient grotesque par multiplication. Une représentation jouissive du refoulé d’une société schizophrène malade de puritanisme. L’espace domestique, figuré par la banlieue, devient scène d’élection pour une farce très contemporaine.

sexandally

Dans une publication récente, la journaliste américaine Susan Faludi remarque que depuis le 11/09/01, les médias américains s’obstinent à annoncer le grand retour de la femme au foyer  qui renonce à sa «carrière» pour se marier et faire des enfants. Une politicienne donnant sa démission pour se consacrer à sa famille est transformée par  la presse enthousiaste en héroïne nationale, et son cas particulier devient exemplaire. Certes, quoi que prétendent les spin doctors chargés de recentrer l’Amérique autour d’un traditionalisme rassurant, ce retour au foyer reste un mythe qui ne s’actualise pas. Reflet de la société et outil de propagande évident, la production sérielle nationale s’en fait le porte-voix : exit les personnalités féminines fortes et autonomes, Sex and the City et Ally McBeal (cf. photomontage:  remarquable évolution vestimentaire) font place aujourd’hui aux Desperate housewives, que Barbara Bush se charge elle-même de promouvoir. Quant à Big Love,  si insidieuse soit son ironie, elle n’en laisse pas moins trois femmes au foyer sans autre perspective que la réussite de leur projet familial. Grinçante et grotesque, cette série est, contre toute pression régressive, un excellent antidote.

Catherine De Poortere

Susan Faludi, The terror dream. Fear and fantasy in 9/11 America, Metropolitan Books, 2007

 

« Berlin Alexanderplatz », R.W. Fassbinder

Coffret de 6 DVD, mis à disposition en trois parties

Un cinéaste majeur du XXe siècle filme son testament, un feuilleton dément de 15heures diffusé à la télévision allemande en 1980. La forme et le fond happent l’attention. Pour vider ainsi ses tripes dans quelque chose de définitif, Fassbinder s’immerge avec délices dans un roman fétiche : « Berlin Alexanderplatz » d’Alfred Döblin, publié en 1929. Tributaires de la traduction, nous ne pouvons avoir qu’une idée approximative de ce roman qui puise une part de sa force moderne dans l’usage créatif d’un certain argot berlinois (quasiment disparu aujourd’hui). Pourtant, tel quel, il fascine par sa manière nerveuse et précise de disséquer une société en pleine déliquescence (la fin de la République de Weimar), par son style scrutant les flux des nouvelles puissances rationnelles qui organisent la production, la consommation et, au fond, toute l’énergie de la vie, des corps et des esprits. Il superpose différents types de narration, il colle des bribes de récits, des séquences informatives avec éléments publicitaires, articles de presse et interventions déjantées du narrateur. Une construction qui évoque un peu Dos Passos et sa trilogie « U.S.A ».

Les abattoirs fonctionnent à la chaîne pour nourrir la grande ville frénétique et renouveler les forces de travail ; les nouvelles sciences désacralisent les fluides organiques et psychiques et mettent à nu les ressorts de l’activité humaine ; les technologies propulsent les corps et les idées dans l’ère de la grande vitesse et de la consommation infinie. Döblin décrit cette métamorphose urbaine par la lorgnette des bas-fonds, avec la pègre qui suit le mouvement et industrialise ses méthodes de pillage, mais aussi tous les paumés qui pataugent, proies faciles des démagogues politiques et des sociétés religieuses qui arpentent la ville et haranguent la misère. Ses mots, ses phrases, ses chapitres traitent la réalité en empathie avec la difficulté des « perdus » ; l’agencement des séquences et l’intervention d’un commentateur introduisent une ironie visionnaire à la manière des toiles de Georges Grosz et Max Beckmann. Techniques expressives déployées, explorées, pour mieux saisir toutes les facettes heurtées du personnage pivot : Franz Biberkopf. Colosse atypique, maquereau sentimental, sujet à des crises de violence. Il sort de prison où il a purgé sa peine pour le meurtre d’une fille, Ida, et le voilà plongé, sans repères, dans la modernité trépidante, insécurisante. Hanté par les images mentales, incompréhensibles, il se voit encore et encore perdre le contrôle de lui-même et massacrer Ida. La grosse brute s’obstine à rester honnête, vivote de petits métiers marginaux, flirte avec les voyous et le monde de la nuit, sombre dans l’alcoolisme, heureusement protégé de loin par un ancien amour, Hana Shygula. Celle-ci lui dégotte une gentille fille qui l’entretient. Il essaie progressivement de comprendre le monde qui change, qui bascule, amorce un changement d’époque. Il ne trouvera jamais d’issue pour vivre tranquille et, à force de questionner et de buter dans l’impasse, il ébauche une sorte de « philosophie brute », qui est à la pensée ce que l’art brut est à l’art, pour justifier son « impossible honnêteté ». Au fil des épisodes, le malfrat épais se mue en individu attachant, familier, proche. Fragile. C’est une mue surprenante, dont le processus stupéfiant s’accomplit imperceptiblement durant des heures, sous nos yeux, et qui rend compte de la capacité à écrire/filmer la complexité humaine.

À mille lieux des séries qui fonctionnent sur la permanence de caricatures.

Le Berlin des années vingt n’existe plus quand Fassbinder tourne. Il va reconstituer quelques lieux et construire son film un peu comme du théâtre filmé. L’ambiance de cette grande ville frénétique sera distillée par des détails, des gros plans, le tout est dans les parties. L’atmosphère de trouble profond, mais aussi le regard singulier que porte Fassbinder sur ce roman, seront rendus par des dispositifs de lumières artificielles, des filtres divers, des particules qui dispersent les faisceaux lumineux, un bas de soie enveloppant la lentille de la caméra. Un huis clos dans les entrailles berlinoises où la richesse des vies intérieures est exprimée dans les plans rapprochés sur les acteurs, les angles expressifs qui cadrent leurs attitudes, hésitations, muscles et nerfs du visage, l’émotion à fleur de peau. Les acteurs sont impressionnants : Günter Lamprecht, Gottfried John, Barbara Sukiwa…

Susan Sontag a déclaré que jamais adaptation cinématographique d’une œuvre littéraire n’avait été réalisée avec autant de justesse, de fidélité par rapport au travail de l’écrivain. Et c’est vrai. Si vous êtes lecteur, vous êtes souvent déçu par les adaptations cinématographiques de romans que vous avez aimés. Une certaine matière profonde, liée à une connaissance particulière que délivre la littérature, manque cruellement. Ce n’est pas le cas ici, l’âme du roman y est intégralement. C’est simple en soi : le parti pris de tourner quinze heures reflète la volonté de respecter le rythme du roman. Et pourtant Fassbinder n’hésite pas à personnaliser sa vision du roman, des personnages. Il donne ainsi une place particulière, que certains commentateurs jugent prépondérante, à l’homosexualité latente dans ce qui se noue de malsain et malveillant entre Biberkopf et Reinhold et qui détermine la tragédie.

En écrivant son roman, Döblin ne pouvait complètement identifier ce qui couvait en Allemagne et qui allait épouvanter le monde. Le cinéaste, lui, est parfaitement au courant, souligne les signes avant-coureurs du nazisme et s’en donne à cœur joie quand il reconstitue l’interminable délire de Biberkopf interné en asile. Là, dans cette tête malade, dans cet être brisé, les barrières cèdent et tout chavire de façon prémonitoire en barbarie, avec hordes sauvages, scènes christiques et sadomasos, expiations, machines de destructions, musiques rock et disco, décors kitch, sous l’œil impassible de Fassbinder.

D’un roman qui lui est cher, qu’il a lu et relu, il aura tiré la compréhension d’une époque où prenait forme l’horreur de la guerre, aiguisé un regard pour mieux comprendre la montée chaotique de la modernité et une trame pour projeter les fantasmes d’une identité difficile à vivre, stigmatisée socialement comme monstrueuse. Un film testament.

Pierre Hemptinne

À lire :

« Berlin Alexanderplatz, ou l’honnêteté impossible », Ian Buruma, dans La Revue internationale des livres et des idées, N°4, mars-avril 2008.

 

Classé dans