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Pointculture_cms | critique

ITINÉRAIRE D'UN VIELLISTE AU 16E SIÈCLE [ATTAINGNANT/ BALLAR

publié le

La musique ancienne offre un vaste terrain de jeu aux collectifs d’artistes, qui, musiciens, danseurs, chanteurs, apprécient d’associer leur discipline et leur talent à la création de spectacles ni tout à fait d’époque, ni, à plus forte raison, […]

 

La musique ancienne offre un vaste terrain de jeu aux collectifs d’artistes, qui, musiciens, danseurs, chanteurs, apprécient d’associer leur discipline et leur talent à la création de spectacles ni tout à fait d’époque, ni, à plus forte raison, d’actualité, qui ressuscitent en esprit les arts d’autrefois dans leurs manifestations les plus festives. Pour percevoir la qualité spécifique de la vielle, instrument sinon oublié, aujourd’hui délaissé, un enregistrement ne suffit pas. Danses, chansons, textes et peintures recréent, mieux qu’une étude historique, la mémoire auditive, dispersée dans les arts de la scène plutôt qu’entièrement contenue dans les partitions.

 

1Le nom que s’est choisi la Compagnie Outre Mesure reflète, sous des apparences légères, un désir très concret d’ignorer les modes, de démontrer que, si ses manifestations évoluent, l’essence du divertissement demeure toujours la même. Jouant sur les sens multiples du mot «mesure» qui exprime aussi bien la notion de « proportion » que celle, plus lexicale, de « cadence », la Compagnie Outre Mesure se pare d’un soupçon d’excès, de frivolité, pour revendiquer sa place dans la modernité. C’est que la démarche de ce collectif français consiste à souligner l’actualité vivace de leur répertoire. Il s’agit d’affirmer que vielle, viole, luth, guiterne et autre sacqueboute, loin de devoir figurer, couverts de poussière, dans des musées-mausolées, n’ont rien à envier à leurs descendants acoustiques ou électroacoustiques, et que, en matière de rythmes et d’ambiance, ils pourraient bien être les derniers à quitter la scène. Convaincus qu’une riche orchestration et des tempos dynamiques disposent naturellement à la danse, ils s’invitent aux bals et conçoivent des spectacles bondissants et colorés.

 

1La Compagnie, fondée en 1999, est dirigée par Robin Joly, mais c’est Laurent Tixier qui tient la vielle. Cet instrument, datant du Moyen Âge, a ceci de particulier que les cordes ne sont pas frottées par un archet, mais par une roue de bois. Cette roue est ensuite actionnée par une manivelle, tandis que la main gauche de l’interprète joue la mélodie sur un clavier. Le son émis par ce dispositif garde intacte dans ses inflexions la trace des matériaux qui le produisent. Il prend alors un caractère composite assez piquant: rauque, éraillé mais sensuel. Suivant les époques, la vielle a tantôt égayé les classes populaires, tantôt la noblesse, parfois les deux ensemble. Instrument démocratique? Raison de plus pour souligner ses qualités intemporelles. Aujourd’hui, si la vielle à roue est encore appréciée dans certains milieux avertis, sa version électroacoustique plaît davantage aux musiciens contemporains (Gilles Chabenat, par exemple). À rebours de cette tendance, la Compagnie Outre Mesure préfère utiliser des instruments d’époque, tenant à préserver la richesse organique du son, quitte à le fondre dans un ensemble orchestral qui, matériellement, n’aurait pas existé à la Renaissance, mais demeure néanmoins fidèle aux traditions musicales, moins littérales que comprises dans une continuité intellectuelle et spirituelle.

 

L’Itinéraire d’un vielliste au 16e siècle nous transporte au cœur de la Renaissance festive. Ça joue, ça danse, ça chante - le livret fournit d’ailleurs de précieuses explications à ceux qui désirent approfondir les chorégraphies de l’époque. Les pièces, très brèves, rebondissent les unes contre les autres, formant un ensemble varié et cohérent. Une écoute attentive accentuera sans doute la valeur mémorielle de ce disque, suscitant des couleurs, des parfums, des tableaux qui existent déjà par les livres, les films et les peintures que l’on connaît sur ce temps, comme une sensation de vécu personnel entièrement fictif et pourtant intégré à la mémoire autant que nos souvenirs « réels ». Ou alors, la musique accomplissant son travail d’ambiance, dans le meilleur sens du terme, emplira d’une chaude atmosphère les soirées d’hiver par ses mélodies vives et mordorées.

 

Catherine De Poortere

 

 

1Vielle et viellistes…

 

Une petite histoire de la vielle, sur le site de La Médiathèque.

Disques de Gilles Chabenat à La Médiathèque

Disques de Laurent Tixier

 

 

 

 

 

 

 

 

Détail de L’Enfer, de Jérôme Bosch (XVe siècle)

 

Selec

 

 

 

 

 

 

 

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