ROYAUME (LE)
Sommaire
Il ne faut pas nécessairement s’intéresser aux origines du christianisme ni à quoi que ce soit de strictement religieux pour être envoûté par le livre de Carrère. Il faut savoir que celui-ci a participé à l’aventure de la rédaction de la Bible des écrivains parue il y a une petite quinzaine d’années, l’idée étant de proposer une traduction faite par des non-spécialistes, bien sûr aidés d’exégètes.
Le Royaume est donc avant tout un livre d’écrivain, le livre d’une personne qui parle de ses interrogations et des mystères en nous ouvrant le plus de portes possibles, le livre aussi d’un enquêteur, comme se définit lui-même l’auteur, un enquêteur qui cherche passionnément à cerner les montagnes d’énigmes historiques, littéraires, poétiques, spirituelles ou philosophiques, les énigmes de notre condition humaine, que représente le Nouveau Testament .
Au fil de ses pérégrinations on retrouve Dostoïevski et Philip K. Dick dont on sait qu’ils sont deux grandes passions de Carrère, on retrouve leurs embrasements et leur tentation mystique, leurs œuvres aussi, elles-mêmes emportées par les recherches éperdues menées par ces deux génies ; on sent donc fortement leur présence comme on sent celle de saint Paul, de Sénèque ou de saint Augustin mais surtout on a le sentiment d’entrer dans la vie de Carrère tant ses interrogations et son enthousiasme transparaissent dans l’évidence de sa narration. Voilà un petit exemple de cette richesse : « Non, je ne crois pas que Jésus soit ressuscité. Je ne crois pas qu'un homme soit revenu d'entre les morts. Seulement, qu'on puisse le croire, et de l'avoir cru moi-même, cela m'intrigue, cela me fascine, cela me trouble, cela me bouleverse [...]. J'écris ce livre pour ne pas me figurer que j'en sais plus long, ne le croyant plus, que ceux qui le croient et que moi-même quand je le croyais. J'écris ce livre pour ne pas abonder dans mon sens. »
Rien de tortueux là-dedans, sans faire de jeu de mots c’est la marche normale de l’esprit. (DS)