MY SHIT IS PERFECT
On savait que derrière son sympathique et excentrique attirail, Bob Log cultivait le luxe d’un type, qui plus est d’un bluesman, caressant la simplicité dans le sens du poil. Sur son petit dernier, il fait montre d’un certain apaisement. Dorénavant, on l’écoutera autant qu’on le déguste.
Pour un bon entretien des méninges, on taillera un rapide portrait du bonhomme. Ce natif de Chicago a toujours revendiqué une filiation avec le blues & le rock (black) des origines, celui des Bo Diddley, Chuck Berry et autre Screaming Jay Hawkins, mais aussi envers le hard rock millésimé d’AC DC, qui doit donc y être pour quelque chose dans le récent déménagement de l’Américain en terres australiennes. Une bonne hygiène de l’orthodoxie binaire (3 accords et basta !) adoptée dès la prime jeunesse, couplée à quelques sains préceptes rock’n’roll (selon ses propres mots : « un bon riff », « des filles qui remuent du popotin » et « un max de bon temps »…) et nourrie d’une méfiance viscérale envers toutes techniques ou moyens qui s’apparenteraient à une forme de lissage dans le son ou de sophistication dans la manière de procéder, figure sur sa carte de visite! Dans une vie antérieure (au sein du duo Doo Rag, 1990-1996), Bob Log III avait encore recours à un batteur qui prenait pour habitude de (re)constituer son kit de batterie à partir de tout objet/débris (couvercles, tôles…) encore bon à être frappé. À présent, c’est une vaillante grosse caisse frénétiquement actionnée uniquement du pied droit qui se charge du tempo. Autre particularisme local, la double fonction de son casque/téléphone, né de la greffe contre nature d’un combiné arrondi de type année 60/70 à un modèle standard de couvre-chef pour motard de la même époque, largement échancré sur l’avant. Dispositif qui filtre et distord la moindre inflexion vocale qui s’y engage avec effets radios « dignes d’une fréquence pirate captée au beau milieu de nulle part sur un récepteur archéologique » garantis, mais comble aussi les lacunes visuelles éventuelles du spectacle d’un one man show en surenchérissant la machine à fantasmes d’une foule de clins d’œil renvoyant aussi bien à une cinéphilie (forcément bis) post « Easy Rider » qu’aux « trash & sexy movies » de Russ Meyer (« Vixen »).
Mais malgré quelques forfaits avérés (rythmer quelques titres bien lourds de sens au son d’une sarabande mammaire endiablée assortie de petits cris, inviter les filles à danser sur ses genoux…) et des tenues qui vont toujours plus loin dans la démesure plouc, il serait dommage de s’en tenir au décorum d’un guitariste dont le jeu ne fait l’économie ni d’une certaine technicité ni, bien que discrets, d’apports technologiques actuels (séquenceurs ?). Plus lentes qu’à l’accoutumée, les chansons de My Shit Is Perfect déploient une gamme d’accords de guitare toujours humbles joliment troussés d’effets (bottlelneck en tête) sur des tempos qui marquent plus d’un temps d’arrêt (« Bumper Car », « Bump Paw! »). C’est peu de chose, mais à l’échelle de Bob Log III, l’équivalent d’un effeuillage qui nous le dévoilerait en papa gâteau au grand cœur !
Touché !
Yannick Hustache