SEQUENZAS I,IV,VIII,IXA & XIV/ DUE PEZZI/ MUSICA LEGGERA/
Il y a en littérature des phrases très longues dans lesquelles on se perd, le cœur battant. Cœur battant parce que l’on a peur de s’y perdre et d’y rester, cœur battant parce que l’on sent l’imminence d’une découverte que l’on a peur de rater faute de vigilance et clairvoyance. On reprend plusieurs fois au début, on repart, on trace son chemin. Il faut lire et relire pour comprendre la « limpidité » singulière du parcours, la direction de la force, le fonctionnement des appendices, des rythmes cassés, des emboîtements… (Par exemple chez Claude Simon)… La même chose se produit, mais sur un autre plan, dans des lectures plus abstraites : l’énonciation épurée de certains concepts exige de relire plusieurs fois, de s’ancrer la marque de la phrase dans le cerveau avant de pouvoir en extraire lentement le sens… Quelque chose de semblable se produit avec les « Sequenza » de Berio. En ce mois de mai, en ce qui me concerne, particulièrement avec la Sequenza XIV pour violoncelle… Une fermeté flottante, « distraite », attaquant ici, partant ailleurs, insistant dans certaines voies ténues, et construisant un tout qui, à son terme, dégage une forte cohésion, un trait homogène alors qu’elle s’écoule en heurts, en lignes brisées, en courbes égarées, pointillistes, en reculades, en « violoncelle qui mue comme un serpent et qui exhibe sa peau vide, morte »…