SON ÉPHÉMÈRE PASSION
La mélodie chez Marc Perrone n'a rien de démagogique, rien de
racoleur. C'est une relation au monde, une manière de penser, de réfléchir
la vie, de se poser des questions, de raconter. Une respiration. Ses mélodies
sont éphémères, elles passent comme les pensées
qui évoluent. Elles suivent, souvent, des progressions en spirales rentrées,
comme une introspection dansée, ou avancent et reculent comme des idées
qui cherchent leurs chemins, en bafouillant, projettent des hypothèses,
cherchent une démonstration. Toute une philosophie de la vie dépouillée.
Dans la rue, proche de la bohème. Pudeur et naïveté pour
dire l'essentiel.
La grâce de l'éphémère va à merveille avec
l'accordéon de Marc Perrone. Dans une proximité sans fard avec
la mort, avec l'amour de la vie. Mélodies qui racontent, brassent, mettent
en abîme, toujours, toute une histoire liée à l'immigration,
qui grimpe dans l'arbre généalogique. D'où l'on vient,
pourquoi, ce qu'il en advient. Mélodies qui sondent un passé non
idyllique, mais où l'on touchait plus facilement l'homme. L'accordéon
est sur son terrain, les changements, les bouleversements du quotidien populaire.
La nostalgie n'est pas bête, elle participe chez Perrone d'une sensibilité
anar. Sans pathos appuyé, c'est léger, ça valse. Éphémère.
Le nouvel album de Marc Perrone est lumineux, irradiant. De quoi encore grandir
l'attachement pour ce musicien gravement touché par la sclérose
en plaques. La raideur qui gagne est d'ailleurs invitée à la fête,
avec pudeur, on fait avec, elle danse au bal. Un album truffé de musiques
de films. Il projette, avec ses airs d'accordéon, des histoires en images
sonores, histoires sentimentales, histoires documentaires. L'accordéon
comme lanterne magique. On y trouve également un texte d'Arthur H. Magnifiquement
simple.
( Pierre Hemptinne, Charleroi )