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Pointculture_cms | critique

KAFU

publié le

OH ! QUE CA BOUGE ! N°6 juin 2006

Chant accompagné au sanshin. Sorte de shamisen. Ballades aux cordes très pincées, très claquées, perlées. Proche du joyeux rythme caractéristique d’Okinawa. La voix part du ventre, en défait le nœud, en monte la substance vers la tête, irrigue le cerveau, se disperse dans l’atmosphère, redescend, va et vient constant, régulier.

 

EXPOSITION


La Maison Rouge, Paris :

"Bruit et fureur" l’œuvre de Henry Darger, "The Good Ingredients", de Michael Borremans , "les livres cuits", de Denise A. Aubertin, "Passage au noir", de Nicolas Darrot.

- D’abord le lieu, à recommander absolument, consacré à l’art brut et à l’art contemporain. Très agréable, très bien agencé.

- Le choc : découvrir la peinture de Michael Borremans, peintre belge (Gand), première expo à Paris. Peinture « traditionnelle », au pinceau sur toiles!! Une série de portraits, presque noir et blanc, presque photographiques, sobres. Voici un retour à la peinture qui ne sent pas le conventionnel, quelle force. Deux autres séries, de motifs plus réduits, plus narratifs, mêlant dessin et utilisation de matériaux de récupération (bouts de lettres, enveloppes, divers papiers déchirés), dégagent une force critique tout en happant la curiosité et l’émotion. Catalogue en anglais, ne reprenant que les portraits; le texte commence par une évocation appuyée de Gombrowicz, on est en bonne compagnie.
- www.lamaisonrouge.org

 

LECTURE


Miguel Benasayag, avec la collaboration d’Angélique del Rey, « Connaître est agir. Paysages et situations. »
(La Découverte, 2006)

- Le paysage est ici un mode d’agir et de connaissance; « Le paysage est le nom du dispositif qui nous permet d’enjamber la saturation du quotidien par l’immédiat. Nous sommes en permanence noyés sous un flot d’informations sur des massacres, des désastres écologiques, des guerres, des injustices, des tortures, etc., qui finissent par nous saturer dans notre capacité limitée, d’élaborer les informations. Mais comment pouvons-nous construire et délimiter des zones d’une certaine clarté où il nous soit possible de connaître et d’agir ? L’agir et la connaissance exigent qu’on soit capable de construire de vraies barrières. » (P. 237)
- Propositions de réflexions qui font bouger pas mal de repères et montre des pistes pour s’échapper des cases antinomiques, des contraires, des forces binaires; on cherche des puissances rayonnantes, deleuziennes, l’important n’est pas de savoir si un autre monde est possible mais comment inventer des possibles, ou plutôt des « compossibles », tout est toujours composé, mélangé, multiples, aucune possibilité d’un point de vue totalisant… Le genre de philosophe qui cherche des manières de penser la complexité pour elle-même, pas de mettre en place des systèmes qui feront comme si elle n’existait pas… Indispensable sur le terrain de l'action culturelle !
- Extrait : « Les responsables politiques des forces conservatrices (de « droite » comme de « gauche ») se targuent, eux, d’être mieux en mesure d’assumer la complexité, se disant moins idéologues et plus empiriques. Mais c’est en vérité une autre forme d’évitement de la complexité, ces dirigeants s’affirmant capables de résoudre tous les problèmes techniques. Dans cette tendance vers l’immédiat, ils adhèrent implicitement au cours des choses, laissant de côté la construction de lignes de résistance et la création du nouveau. Sous des airs faussement sérieux, ces hommes et femmes politiques ne sont guère sérieux… »- Pour donner le ton, quelques titres de chapitre : Notre époque a perdu sa glande pinéale, A la recherche du paysage, De l’extinction du paysage, Cet être aux synapses interdites… Paysage, Progrès, changement, Une critique progressiste du progrès… La fabrication de la perception, Perception et réalité, Des informations qui nous laissent dans l’impuissance, Etudier la perception, Les êtres par agrégation ; Nos sens ne nous trompent jamais, Une question d’expérience, L’erreur n’existe jamais ; Le déterminisme et la liberté, Un savoir sans garanties, Un « autre monde » est-il possible ? ; Pour en finir avec l’idéologie de la solution, Le deuil de la cohérence, Les personnages de Beckett ; L’opérateur d’agir : le paysage, La question d’autrui, L’intersubjectivité…

Giorgio Bassani, « Le roman de Ferrare », (Gallimard/Quarto, 2006)

- Rassemblées en un tout, les nouvelles de Bassani, sous un seul titre, sous une seule quête littéraire. Elles parlent toutes de Ferrare. Des gens, des lieux, des recoupements biographiques, des généalogies, de l’évolution des lieux, de l’architecture. Ferrare est ici historique, elle est tout autant un lieu imaginaire qui reflète le monde, inventé pour penser le monde.

- Le destin des juifs, du ghetto de Ferrare, la promulgation des lois raciales par Mussolini… sont des ferments qui agissent dans toutes les narrations, dans les destins racontés.

- Le style est soigné, lorgne vers Proust; les phrases sont des dispositifs qui cherchent à en dire plus… Pour qualifier ce travail de style, j’utiliserais ces mots de Benasayag: ««La pensée humaine ne se déploie jamais comme le déroulement d’une phrase cohérente, elle engage des niveaux de profondeur multiples, jamais linéaires. Dans un processus d’élaboration de pensée interviennent des volumes, des couleurs, des éléments de combinatoires symboliques, des sauts à la conclusion, etc. Bref, un ensemble de processus complexes qui ne permet pas de soutenir l’apartheid entre pensée et instinct.» (Connaître et agir, La Découverte)

- Belle édition soignée chez Quarto, avec biographie, appareil critique, ligne historique italienne…

- Les textes de Bassani ont donné lieu à quelques films célèbres : « Le jardin des Finzi-Contini » (1971, De Sica), « Lunettes d’or », (1987, Montaldo), …

 
RESTAURANT


- Sel et Sucre, rue de Nimy, 6, 7000 Mons

Cuisine créative, raffinée. Accompagnements soignés. Salle acceuillante. Service impeccable sans être envahissant. Menu Découverte, menu dégustation, formule le midi en semaine. Une des meilleures tables actuelles de Mons, incontestablement.

 

CONCERT


KYRIAKIDES et ANDY MOOR
- 1er juin, Ferme du Biéreau

Ils évoquent et croisent leurs racines et leurs possibles rebetiko, musique traditionnelle grecque, chants de prisons, de drogue, de prostitution (comme création de « paysages sonores », dans le sens développé par benasayag dans son livre, soit «unité de perception, unité d’agir, qui nous permet d’assumer concrètement une pensée de la complexité qui ne soit pas simple déclaration d’intention». Les deux musiciens construisent de pareilles unités en associant leurs visons et leurs perceptions différentes d’un même héritage musical, partant de positions historiques dissemblables, l’un grec l’autre néerlandais, leurs manières de faire, leurs instruments différents (électronique pour l’un, guitare électrique pour l’autre)… la musique qu’ils composent restituent la complexité de penser et sentir une musique d’ailleurs, d’une autre culture, d’une autre époque, et dans cette complexité justement sentie,  cette musique est restituée correctement, sans rien de réducteur ni rien de folklorique…
PH

 

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