Once upon a time in Babilonia
Paolo et Vittorio Taviani, en bons bâtisseurs, jettent des ponts entre les cultures, entre les arts. Tout en s’inscrivant dans l’Histoire, celle du film Intolérance réalisé par D.W. Griffith en 1916, les frères cinéastes posent un discours lucide et pertinent sur la force collective qui a permis aux cathédrales, mais aussi aux chefs-d’œuvre cinématographiques de voir le jour. En exposant ce fait authentique, ils créent un révélateur social : comment pourrait-on réaliser un grand film sans l’apport essentiel d’une équipe aux multiples talents ?
Cette richesse, bon nombre de pays – et particulièrement les États-Unis – l’ont trouvée dans l’héritage parfois ancestral des communautés qui les peuplent. Les frères Taviani nous rappellent que la culture, artistique ou autre, est une question de transmission. Et que celle-ci se construit donc avec le temps. C’est en voyant le film Cabiria que Griffith comprend que, sans le génie artistique des artistes italiens, son film n’aura pas l’impact escompté. Cette forme d’atavisme artisanal n’est pas présente chez les membres de l’équipe du film qui entrevoient leur travail de façon plus pragmatique (empirique même) que spontanée.
Perçu par les populations migrantes comme une terre d’espoir, le pays de tous les possibles, le Nouveau Monde n’est en fait – toujours au XXe siècle – qu’un désert. Et c’est bien sur une terre aride que Andrea et Nicola, fraîchement débarqués de leur Italie natale, vont voir leur statut d’artisans se muer en celui de garçons porchers. Car dans cette jeune nation, tout reste à construire. Y compris la mémoire, l’héritage des générations se transmettant culture et savoirs.
Leur chance viendra du Cinéma qui, à l’instar des États-Unis, est une forme artistique en plein essor dont l'histoire reste à écrire. Cette aventure nouvelle et enthousiasmante va se bâtir sur les compétences et le patrimoine culturel que les deux frères (mais aussi les autres membres de l'équipe) ont à offrir à ce projet commun.
À travers ce témoignage, les frères Taviani rendent également hommage à ce Hollywood des premiers temps où le savoir-faire des uns s'est greffé à l'ingéniosité et à l'esprit de découverte des autres.