Oumou Sangaré : Mogoya
Cette autre valeur sûre de la musique malienne (à vocation internationale) qu’est Oumou Sangaré vient de briser un long silence discographique de huit années. Le précédent, Seya remontait déjà à 2009 et le petit dernier nommé Mogoya paraît sur le label No Format, sous une pochette plutôt flashy, et avec une patine sonore impeccable qui laisse deviner un long travail de peaufinage en studio. Et pourtant, Mogoya reste un disque accueillant et habité, toujours à hauteur d’homme ou plutôt de femme. Car c’est essentiellement à elle(s) que s’adresse cette bientôt cinquantenaire. Dans les textes de ses chansons, bien commentés dans le livret, il est essentiellement question de sa place dans une société africaine en mutation certes, mais encore grevée dans ses schémas patriarcaux ou claniques (« Fadjamou ») ancestraux. Dans « Kamelemba », les séducteurs patentés à la langue fleurie en prennent pour leur grade. Ailleurs (« Bena Bena », « Mali Niale »), la chanteuse enjoint à ses sœurs de poursuivre leur chemin de vie sans se soucier des racontars et jalousies, et dans « Minata Waraba », elle rend hommage à sa mère.
Côté orchestration, ce qu’il faut bien appeler de «l’afro-pop 2.1 » intrique emprunts musicaux traditionnels (comme le Wassoulou) et efficacité radiophonique popisante à l’occidentale avec une certaine réussite. L’inusable batteur Tony Allen vient dynamiter de son groove tout-terrain pas moins de deux titres. Un solo d’orgue vient l’appuyer sur « Fadjamou ». « Djoukouru » se charge d’un solo de guitare efficace juste pas trop long. Mais la Malienne attend la conclusion de son disque pour livrer son titre (celui de l’album) le plus déchirant. Un « Mogoya » écartelé entre la souplesse rampante d’une basse féline et l’élégance ample de synthé aériennes.
(YH)