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Pointculture_cms | critique

CORTO MALTESE: LA COUR SECRÈTE DES ARCANES

publié le

À l’heure où un film sur deux est basé sur un ouvrage littéraire, qu’il soit autobiographique ou de fiction, il eut été étonnant que la bande dessinée échappe à l’adaptation cinématographique, comme en témoignent American Splendor et Corto Maltese, la […]

À l’heure où un film sur deux est basé sur un ouvrage littéraire, qu’il soit autobiographique ou de fiction, il eut été étonnant que la bande dessinée échappe à l’adaptation cinématographique, comme en témoignent American Splendor et Corto Maltese, la cour secrète des arcanes.

L’autre rêve américain

American Splendor revient avec un humour dévastateur sur la série de bande dessinées autobiographiques créée dans les années 70 par Harvey Pekar. Interprété à l’écran par Paul Giamatti (Sideways, La jeune Fille de l’Eau), l’auteur rendit simplement compte de son quotidien en tant que documentaliste dans une administration hospitalière de Cleveland – une matière à mille lieues des thèmes généralement abordés dans la bande dessinée américaine de cette époque. Soutenu par l’illustrateur Robert Crumb, Harvey Pekar devint ainsi le porte-parole d’une autre Amérique, celle des anti-héros aux soucis banals.

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Bien décidés à rendre hommage à ce doux énergumène, Shari Springer Bergman et Robert Pulcini  réalisèrent en 2003 American Splendor, le film.

Tranches de vie reconstituées (le quotidien de Pekar, ses collègues de travail, une rencontre amoureuse…) y côtoient archives et entretiens avec les «vrais» protagonistes de l’histoire, à commencer par Harvey Pekar et son épouse, Joyce Brabner (à laquelle l’actrice Hope Davis prête ses traits), qui y vont de leurs commentaires sur l’intrigue, ou plutôt l’absence d’intrigue: comme dans la bande dessinée, les auteurs se sont davantage attachés aux petits détails heureux et malheureux de l’existence, montrant que le bonheur est simple, furtif et souvent entrecoupé de coups du destin totalement imprévus.

Ajoutons à cela une galerie de portraits plus vraie que nature (avec une mention spéciale pour Toby Radloff, collègue de travail légèrement décalé de Harvey Pekar), et l’on obtient une comédie douce-amère aussi profonde que désinvolte dans laquelle tout un chacun pourra se retrouver d’une façon ou d’une autre…

Aventurier dandy

Dans un tout autre registre, Corto Maltese, la cour secrète des arcanes s’attaque à une figure emblématique de la bande dessinée du XXe siècle: créé par l’Italien Hugo Pratt, lui-même un grand voyageur, l’aventurier dandy a fait rêver des générations de gamins avant d’être porté à l’écran sous forme de cinéma d’animation en 2001 par le Français Pascal Morelli. Il lui faudra cinq ans pour assembler les 500000 images nécessaires à son premier long métrage. Un travail de titan mené à terme avec passion et savoir-faire.

1C’est qu’il fallait être un peu fou pour se lancer dans un projet comme celui-ci: non seulement, le cinéaste touchait à un personnage quasi-mythique, mais il allait en plus lui donner des couleurs (les albums étaient en noir et blanc), une voix (celle de Richard Berry) et une gestuelle. Bref: toute une vie à inventer en dehors du papier.

Fidèle à l’ouvrage dont il est tiré (Corto Maltese en Sibérie), le film se déploie avec lenteur, dans ce rythme si particulier qu’était celui d’Hugo Pratt. Les personnages évoluent avec une grande économie de gestes et de paroles dans des décors admirables, et si l’animation n’est pas toujours d’une fluidité exemplaire, l’intrigue est néanmoins assez palpitante que pour faire oublier ces petits défauts de production.

Catherine Thieron

 

 

 

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