DODESUKADEN
Ils sont une quinzaine de musiciens, ils viennent du Japon et ils formulent une pop orchestrale, féerique, un peu timide, vraiment pas classique. A l’origine, en 1995, ils n’étaient que six réunis autour du leader
Rocket Matsu et tellement fans de l’univers musical ludique de Pascal COMELADE qu’ils n’interprétaient que les compositions du musicien français. Peu à peu ils ont élargi leur répertoire en reprenant d’autres compositeurs et en jouant aussi leurs propres morceaux. C’est grâce à Comelade de retour d’une tournée au Japon en 2000 que le premier album éponyme des Pascals est paru sur le label de Nancy Les Disques Du Soleil Et De L’Acier. On y trouve entre autres hommages une délicieuse version bancale à la scie musicale, chantée en japonais, de Moon River de Henry Mancini et plus loin une reprise tendrement déglinguée et enfantine d’Amarcord de Nino Rota.
Au confluent de l’orchestre pop exotique, de la fanfare folk et du rock big band de cirque, ces musiciens rêveurs manipulent 36 instruments les plus divers, rapprochant les traditionnels guitares, basse, piano, les cordes classiques et les vents que l’on connaît d’une joyeuse panoplie d’instruments jouets, de pianicas (petits claviers raccordés à la bouche par un tuyau souple), accordéons, guimbardes, scie musicale, mandoline, banjo et percussions miniatures.
Il n’y a sans doute que des Japonais pour imaginer une telle musique, une pop internationale pleine de références aux musiques traditionnelles et populaires d’Europe. Sur leur second album « Abiento » sorti en 2003, ils brassent vraiment large, enchaînant polka traditionnelle et thèmes piqués à des personnalités aussi différentes que Jonathan Richman, Brian Eno, The Meters et Abdullah Ibrahim.
Voilà qu’en 2005 ils nous reviennent avec cet album dédié au réalisateur Akira Kurosawa : l’album est heureusement beaucoup moins tragique que le film Dodesukaden. Il se distingue toujours par ce bel entrain instrumental combinant sourires tristes, jeu moqueur et mélodies sentimentales. Une douce folie pastorale et acoustique comme dans une version asiatique d’un Jour de Fête de Jacques Tati : un orchestre qui fait sérieusement le clown.
L’album s’ouvre par un morceau très balancé, presque rock, avec une section rythmique entêtante qui permet aux instruments à vent, aux violons et aux pianicas d’entonner mélodies simples et harmonies inattendues. La seconde plage, aussi une composition de Rocket Matsu débride guitare électrique et cuivres tout en renouant avec l’éclectisme instrumental des premiers albums. Dans l’ensemble les interprétations et les compositions originales sont moins fragiles moins approximatives, les arrangements plus soignés que précédemment, presque sophistiqués, la production est meilleure. L’effet de surprise en moins, cet album est plein de ressources, les compositions sont plus travaillées mais toujours aussi poétiques, elles gardent heureusement ce petit côté bancal, espiègle et jovial très adroitement orchestré.
Les Pascals aiment la vie et le monde, les rizières en terrasses, le cinéma et les musiques de films, les compositeurs européens, les musiques populaires, les ambiances incertaines, les polkas, la valse, le funk et la musique latine, le tango et bien d’autres éléments qu’ils arrivent à intégrer comme dans un rêve avec légèreté, doigté et beaucoup d’humour.