Réalisé en 1971, période trouble et houleuse pour les États-Unis, Punishment Park relève d’une uchronie, la possible déclaration d’un état d’urgence par le président Nixon. Cette mesure exceptionnelle permettrait l’arrestation de tout individu soupçonné d’atteinte à la sûreté de l’état. Pour la cause, un tribunal civil exceptionnel est réuni en Californie pour instruire le procès d’un groupe de révolutionnaires présumés. Pendant ce temps, d’autres accusés découvrent les règles du «jeu» auquel ils vont devoir participer pour avoir choisi cette alternative plutôt que d'être incarcérés dans un pénitencier: ils auront trois jours pour échapper aux forces de police lancées à leur poursuite en plein désert pour atteindre un drapeau américain situé 80 kilomètres plus loin.
Pour fictif qu’il puisse être, ce film puise son inspiration et sa force dans l’hypocrisie évidente qui peut sévir aux États-Unis (et ailleurs) chez une frange de la population bien pensante et garante de la moralité. Les opposants à la pensée unique sont traqués et poursuivis, un peu comme dans 1984 (VM3708).
Ici encore Watkins se veut contestataire et garant de la liberté de penser. Pour rendre compte de la gravité de la situation et appuyer son propos, il opte pour une forme documentaire. Passant habilement des séances de tribunal aux scènes de course poursuite dans le désert, la caméra saisit avec frénésie et fureur cette tyrannie arbitraire et hypocrite. Car c’est bien là tout le paradoxe de ce pouvoir réactionnaire, héritier autoproclamé de la démocratie; c’est en prenant des mesures tyranniques qu’il se voit générateur d’un chaos infiniment plus important que celui qu’il tenait à éviter. Punishment Park fait partie de ces -trop- rares fictions qui effleurent tant la réalité qu’elles en sont effrayantes.

Michael Avenia