HOOLIGANS
Dans cette fiction policière à incidence documentaire, quatre jeunes policiers sont chargés d’infiltrer une bande de hooligans sévissant à Shadwell, club de deuxième division de la banlieue de Londres, pour en identifier les meneurs. Ils se prennent au jeu au point de devenir de réels supporters de l’équipe, mais l’un des quatre va progressivement dépasser toutes les limites. En effet, en compagnie de Trevor, John (Reece Dinsdale) est parvenu à entrer au « Rock », le pub servant de base à la bande. Une lente métamorphose va plonger John dans l’ultraviolence, lui faire renier famille et profession, le muer lui-même en leader hooligan.
L’itinéraire de l’anti-héros est caricatural, les mécanismes de sa « bascule » psychologique restent sommaires et l’on demeure sceptique face à la soudaineté de cette fascination double, pour le foot et pour la bagarre. Reste que le film de Davis, entre M. Leigh et K. Loach, est littéralement « coup de poing » et criant de réalisme descriptif, mais aussi positivement dérangeant par son ambiguïté même : la limite y fluctue sans cesse entre ordre et désordre, l’incessant va-et-vient entre points de vue de flics et de voyous brouille les rôles. Il y a davantage description d’un phénomène se développant parallèlement au football, qu’une quelconque incrimination du football lui-même en tant que vecteur de violence. Bien construit, le scénario amène à cet amer constat : le monstre, c’est juste quelqu’un comme nous, mais qui ne sait pas s’arrêter.
(Bernard JeuneJean)