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Pointculture_cms | critique

PLAYTHROUGHS

publié le

Premier album de Keith Fullerton Whitman sur le label Kranky, pour lequel il élabore, à partir d’une guitare et d’un système modulaire de sa composition, une série de pièces électroniques méditatives et éthérées.

Keith Fullerton Whitman a longtemps été plus connu pour son travail autour de la musique des autres, en tant que journaliste, patron du label Reckankreuzungsklankewerkzeuge et fondateur de la firme de distribution Mimaroglu Music Sales (spécialisée en musique obscure et rare), que pour sa propre production. Il parviendra néanmoins à mener, en plus de toute cette activité, deux carrières de front, l’une sous son nom, comme compositeur de musique électronique d’avant-garde (pour simplifier) et l’autre, sous le nom de Hrvatski, comme musicien de breakbeats, avec un amour déclaré pour la jungle vintage. La première de ces deux identités est née dès son plus jeune âge lorsqu’il a commencé à programmer de la musique sur ordinateur dans le salon de ses parents, avant de s’inscrire à la section de musique informatique du Berklee College of Music.
Passionné de musique électronique sous toutes ses formes, depuis les mythiques pionniers des studios européens au siècle dernier, jusqu’aux plus obscures musiques expérimentales actuelles, il a élaboré un système mêlant traitement informatique et synthétiseurs modulaires analogues, au travers desquels il filtre et métamorphose différents instruments. On l’a ainsi vu jouer successivement de l’oud, du billard électrique, des claviers Buchla, des modules Serge ou des field-recordings. Cet album, un de ses premiers (il marque ses débuts sur le label Kranky), est composé à la guitare. Non que cela s’entende vraiment, vu l’étendue des transmutations que fait subir son système à l’instrument.
S’il évoquait à sa sortie d’autres musiciens, comme Oval ou les systèmes de delay infini de Terry Riley (le fameux Time Lag Accumulator), c’est peut-être bien plus du travail d’Éliane Radigue qu’il se rapproche. La connexion est plus facile à déceler aujourd’hui, puisqu’il a dédié une de ses pièces les plus récentes à la compositrice. Mais le lien n’est pas aussi ténu et ne s’arrête pas là, et l’on peut sentir chez lui une même démarche méticuleuse, basée sur un équilibre sonore minutieusement réalisé par des gestes économes et précis, réclamant une même concentration et un même perfectionnisme. Les pièces de cet album sont toutes basées sur des drones flottants, de lentes vagues synthétiques à l’origine indécelable, qui s’entrelacent imperceptiblement durant une courte tranche d’éternité, d’un début imprécis à une fin inexpliquée. Statiques mais comme parcourues d’un scintillement permanent, les pièces explorent plusieurs tonalités très différentes, mais toutes traversées de reflets changeants, d’un étrange pétillement, comme le reflet d’un même soleil sur différentes mers.

Benoit Deuxant

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