SOCIAL HIDE & SEEK
Olivier Lambin, alias Red, a le poil roux mais de sacrés bleus à l’âme. Ceux qui fréquentent déjà ce Lillois au blues rugueux et désespéré savent qu’on trouve dans ses albums une paradoxale chaleur réconfortante. A travers ses mots mal dégrossis, parfois très crus, chantés dans un anglais instinctif, volontairement approximatif, il suinte l’authenticité. En évitant les pittoresques éructations waitsiennes d’un Arno ou les incantations cérébrales d’un Rodolphe Burger, il grogne et grommelle avec passion sa colère et ses désillusions. « Je suis presque un chanteur, j’aurais voulu être un crooner », lâche-t-il sur Fucking Hell. Tout ce qu’on n’est pas tout à fait, tout ce que l’on ne sera jamais : tel est le lamento angoissant de cet inquiétant oiseau extralucide qui n’a, curieusement, rien de déprimant. Bien sûr, la succession de titres aux ambiances constantes - un rock industriel primitif qui fait parfois songer aux Stooges d’origine - n’invite pas à la fiesta et à la légèreté. Mais la musique intense et envoûtante de Red touche au cœur comme certaines œuvres inexplicables d’art brut. Social Hide and Seek est une tranche d’« uneasy listening » salutaire. Vitale.