La république du Cap-Vert (Cabo Verde) est un archipel volcanique baignant au large des côtes ouest de l’Afrique, à hauteur de la Mauritanie et du Sénégal. Cette ancienne colonie portugaise fut dès avant son indépendance, obtenue en 1975, et jusqu’à la fin des années 1980 l’épicentre incongru d’une fusion orchestrale analogique originale aux confins des traditions africaines, européennes (portugaise) et des déferlantes sonores venus du nouveau monde, une espèce de compensation musicale involontaire pour le prix d’un exil artistique obligatoire, Cabo Verde ne disposait alors d’aucune infrastructure digne de ce nom. Un mélange riche et chaloupé, gorgé de synthés amples (moog) que d’aucuns requalifieront aujourd’hui en « vintage », de basses sautillantes, de guitares claires et habiles, et d’une foule de dispositifs rythmiques variés et imaginatifs. Autre liant des 18 artistes locaux ou de la diaspora repris sur ce disque, ce chant en créole cap-verdien (variante créolienne locale à forte composante portugaise) qui module sa scansion dans une douce langueur moite, entre suppliques énamourées, chants d’espoir et odes nostalgiques au(x) pays/siens laissé(s) derrière soi (le Cap-Vert est une terre d’émigration) ! Inévitablement, les marqueurs des grands courants musicaux 70’s et 80’s impriment plus ou moins fortement leurs teintes à ces 18 nuanciers d’hédonisme un peu triste (serait-ce là l’effet direct d’une Saudade tropicale ?). Manuel Gomes et son « Jelivrà Bo Situaçon » place l’archipel capverdien à quelques encablures du Brésil de la fin des 60’s, Val "Xalino injecte un soupçon de disco à « Dança Dança T'Manche » et le « Bo Ta Cool » de Jovino Dos Santos aurait pu, dans un monde idéal devenir, l’hymne d’un été sans fin, solo de moog en sus ! Plus loin, « Babylon 79 » d’Américo Brito fait ressortir les origines africaines du ska originel et « Posse Bronck»  de Nhô Balta en appelle à une fraternité musicale en solidarité avec les camarades de Cuba. Synthesizez-vous ?

YH