MÉLODIE DU MALHEUR (LA)
La famille Katakuris s’installe à la campagne pour y tenir une auberge qui, l’espère-t-elle, rencontrera beaucoup de succès.
Takashi Miike, réalisateur-culte et touche-à-tout, nous livre, brut de décoffrage, une surréelle comédie musicale d’horreur avec, en guest-stars, des zombies dansant et chantant (Thriller* de Michael Jackson n’est pas loin…). Une avalanche de morts (a)variés, plus une prise d’otage, s’abattent sur nos aubergistes affolés à un rythme d’opéra rock.
Se mélangent alors allègrement le mélodrame, la série noire, la romance, les pâtes à modeler, le gore, le sexe, en une mixture décapante d’un bon goût douteux, mijotée avec les cartoons de Tex Avery*, la série South Park*, La petite maison dans la prairie*, Psychose*, La mélodie du bonheur*, La nuit des morts-vivants*, Zombie*, les productions Troma*, les Monty Python*, Rocky Horror Picture Show*, et même (ouf !) Les parapluies de Cherbourg* (La, la, la… l’air, la chanson d’introduction et la musique sont un clin d’œil à Michel Legrand*), et Les demoiselles de Rochefort* (la scène du gigolo de service dansant déguisé en marin). Soit La chose d’un autre monde* vampirisant toutes les formes possibles et imaginables au rythme des pulsions du réalisateur.
Tourbillon brouillon, ce remake chocolat 100% cacao, aspire le spectateur enfiévré vers de nauséeuses, mais exquises, profondeurs. Plusieurs scènes sont inénarrables : un monstre en pâte à modeler sort de la soupe d’une jeune fille, lui entre dans la gorge, en ressort avec une luette en forme de cœur qu’il dévore avec amour; un sumo cardiaque meurt en faisant frénétiquement l’amour avec sa nymphette; visons aussi un duo sentimental intempestif en séquence karaoké hilarante de mièvrerie. Miike marie les cauchemars enfantins à la féerie dysneyenne d’une nature idyllique fleurie d’herbe tendre et de vertes prairies, où courent les Katakuris enfin réunis et heureux, rejoints par leur chien fidèle. Joli happy end !
À travers une production abondante de qualité inégale (plus de soixante films dont onze sont disponibles à la Médiathèque - à la date du 5 juillet 2006), ce « filmeur » compulsif s’est créé une aura hors du commun dans le cinéma japonais d’abord, international ensuite.
Le traitement infligé aux scénarios, aux personnages, la théâtralisation des situations, le choix des acteurs issus souvent de la scène musicale ou du cinéma des années soixante, parfois mollement dirigés et improvisant, l’usage de plusieurs techniques de mises en images, la modernité du style mêlé de classicisme, voire de kitch, les fins ambiguës, insatisfaisantes qui poussent à la discussion et emballent les admirateurs, caractérisent leur auteur. La mélodie du malheur, Prix Spécial du jury 2004 au festival Fantastic’Arts de Gérardmer, est une re-création inspirée du film coréen The Quiet Family (1998) réalisé par Kim Jee-Woon.
*Films, séries et musiques disponibles dans nos collections.
PC