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Pointculture_cms | critique

PROLETARIAN DRIFT

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Voici un CD où deux musiciens tapotent une guitare ou un luth et émettent

Voici un CD où deux musiciens tapotent une guitare ou un luth et émettent sporadiquement des kling kling désaccordés. Désaccordés et donc proches de la sortie, du rebut, au bord de l’évanouissement, presque frappés d’extase (cette extase brute, soudaine, qui saisit par surprise, inexplicable et fait bégayer, dérailler, presque honteuse). Les instruments ne sont pas joués en tant que tels, ils sont là comme médiums. Leurs à-côtés, leurs potentiels transformistes comptent autant que leur nature première. Ou bien c’est leur nature première qui est recherchée, avant qu’ils soient vraiment instruments de musique, du temps où leurs futurs composants et matières faisaient partie de la vie, de la nature ? Leurs diverses résistances et résonances sont tâtées, excitées. Le bois, le nylon. Le brillant, le mat. L’extérieur, l’intérieur. Les morceaux s’intitulent Golden mass et Ascension. Récit post épileptique dans un oubli radieux de la musique. Il n’y a de religieux que le renoncement aux fastes musicaux d’église et le parti pris de rugueux, d’abrupt, de rudimentaire. Bouts de sons paralytiques. Une seule écoute laissera perplexe : c’est tellement loin des standards musicaux. Il faudra une certaine insistance pour accrocher. Pour capter que, malgré l’émiettement, l’aura subsiste, le sacré est présent, un souffle anime ces débris de guitare et de luth. La musique paralytique se lève et chantonne. Entre les sons qui semblaient s’ignorer, quelque chose se tisse. Un rapprochement. Une prière se noue bien au long de ce chapelet de sons désarticulés. Une concentration des deux musiciens existe qui conduit à une expérience à partager (et ça c’est ouvert à tout le monde). Un goutte-à-goutte qui glisse vers la quintessence entre figement et éblouissement. Ça progresse par à-coups aveugles, célébrations perlées. Secrets hermétiques d’un culte caché, progressivement mis en charpie, immolés note à note entre luth et guitare. La sauce prend. Les cordes sonnant comme des volées de cloches, de carillon. Belles sonorités pleines, troublées, transies. Il y a ici une expérience d’écoute à faire, une aventure, une ouverture, une différence. Une expérience qui gagne à être élargie en écoutant les autres travaux d’Akiyama présents à la Médiathèque. Parce qu’alors on peut évaluer la « suite dans les idées » de ce musicien, une logique dans sa recherche, une orientation plus argumentée, avec des facettes variées, un univers mental et sonore beaucoup moins facile à nier…
(Pierre Hemptinne, Charleroi)

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