RIGHT COMBINATION (THE)
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Joe Albany se trouve sur un continent oublié et les continents oubliés m’angoissent. Avec eux il n’y a pas trente-six solutions, soit on considère l’oubli comme un attribut à part entière de la mémoire soit on trouve ça injuste, on déprime et on est guetté par la névrose. En effet, s’imaginer que tous les bons musiciens passeront à la postérité est stupide et pas mal d’entre eux passent à la trappe alors qu’ils mériteraient une ample reconnaissance. Que faire alors lorsqu’on tombe sur une perle devenue vieille: en parler bien sûr, en espérant redonner un peu de visibilité à l’artiste ou à tout le moins toucher quelques personnes.
Albany figure dans certains dictionnaires de jazz et le moins que l’on puisse dire est que son parcours de vie est chaotique, entre sessions disparates, addictions diverses et séjours en prison. Pas de quoi donc créer de la mythologie ou hypnotiser les foules. Pourtant le fait est là, avec des airs de Art Tatum désorienté et de bopper hétérodoxe, il passionne, ébloui et procure un immense plaisir.
Dans ce disque, avec le géant Warne Marsh (sax ténor, disciple de Lennie Tristano et un des plus grands solistes du jazz moderne, dixit Xavier Prévost) et le bassiste Bob Whitlock, il se place en plein milieu d’un jazz intemporel, immédiatement familier et pourtant toujours innovateur, musique inépuisable et il serait vain de prétendre affirmer que je sais pourquoi. Certitude, conviction, évidence sans doute. L’oubli est oublié, pour quelques instants. (DS)