MALI MÉLO
Tramé comme un carnet de voyage, le second album de Toma Sidibé (Thomas Lambert), multi-instrumentiste, accompagné de son groupe les Duniakaw, autoproduit dans les studios de Ali Farko Touré et produit par Liam Farrel (alias Doctor. L), nous transporte au cœur du Mali. Album hommage à la terre originelle, passerelles musicales et sentimentales entre savane et métropole. La démarche est connue depuis Manu Ciao et aurait pu verser dans un certain « exotisme », dans une World Music mercantile et plaisante. Tel n'est pas le cas. Ces chansons-paysage, vertes comme le mil, ocrées de poussière, mouillées de vécu offrent, sous un habillage musical puisé au cœur des traditions de l'Afrique de l'Ouest, un désir d'authenticité actuelle, un souhait de métissage, de complicité. Le mariage entre les instruments traditionnels du Mali (Dun-dun, balafon, tama, ngoni, djembé…), joués tout en contretemps en gardant l'essence mélodique et les instruments modernes (guitares, batterie, flûte), cimente des chansons griots. Le savoir-faire est là, il transpire d'un savoir être à fleur de peau. Dans un lied vocal limpide, de sa voix de riddims, Toma Sidibé jongle avec les mots, imprimant une sorte de sabir aux langueurs voluptueuses entre anglais, bambara et tchatche métissée. L'écriture finement ciselée séduisante de douceur n'en laisse pas moins la place à l'engagement. L'exil ( Aventurier ), la colonisation ( Enchaînés ), la télé mortifère accrochant perpétuellement aux cimaises les guerres ( Télékélé ), mais aussi l'espoir de l'enfance ( Petit frère ) et d'humanité. Une alternative plus que conseillée à Corneille.
( Brigitte Lebleu, Charleroi )