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Pointculture_cms | critique

Amour maternel - « True Mothers », un film de Naomi Kawase (2020)

True Mothers

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publié le par Anne-Sophie De Sutter

Dans son nouveau film True Mothers, la cinéaste japonaise Naomi Kawase pose la question de la maternité, et des rapports que peuvent avoir une mère biologique et une mère adoptive avec leur enfant.

Installés dans un superbe et lumineux appartement de Tokyo, avec vue sur la baie, Satoko (Hiromi Nagasaku) et Kiyokazu Kurihara (Arata Iura) semblent avoir une vie parfaite avec leur fils de cinq ans Asato. Mais une querelle de maternelle entre Asato et une petite fille qu’il aurait poussée sème le trouble chez les parents. Un flashback renvoie à leur passé difficile : Kiyokazu était infertile, et malgré des tentatives de fécondation in vitro, le couple n’arrivait pas à avoir des enfants. Suite à un reportage télévisé, ils se tournent vers l’adoption, faisant confiance à l’association « Baby Baton », dirigée par Shizue Asami (Miyoko Asada). Un second flashback raconte l’histoire de la jeune adolescente Hikari (Aju Makita), la mère biologique d’Asato. Elle est envoyée par ses parents, honteux de sa grossesse, auprès d’Asami qui prend le rôle d’une mère de substitution, s’occupant d’elle et d’autres jeunes filles enceintes avec beaucoup d’amour et de compassion, loin des yeux du monde. Plusieurs années plus tard, dans le temps présent du récit, une Hikari à la dérive contacte les parents adoptifs du petit et leur fait du chantage en leur demandant de récupérer son enfant ou de recevoir une compensation pécuniaire, malgré le contrat qu’elle a signé au moment de l’adoption.

True Mothers n’est pas le premier film de Naomi Kawase qui traite de la maternité et des liens familiaux. C’est en effet un sujet qui lui tient à cœur, ayant été élevée par sa grand-mère après le départ de son père, et elle avait abordé la question dans son documentaire Naissance et maternité (2006). Elle poursuit ici ses interrogations sur ce qu’est être une mère. Où commence et où se termine la maternité ? Peut-on aimer un enfant qui n’est pas de son sang ? Que ressent-on quand on a enfanté ? Kawase analyse avec finesse les sentiments de la mère adoptive, ses craintes de mal faire, sa peur de perdre cet enfant tant désiré, mais aussi ceux de la mère biologique. Elle n’avait que 14 ans quand elle est tombée enceinte et était une honte pour sa famille. La seule solution possible, imposée par ses parents, était de quitter son école pendant quelques mois (sous le couvert d’une pneumonie) et de rejoindre la maison de « Baby Baton » (du nom des bâtons de relais) sur une petite île de la mer Intérieure, près d’Hiroshima. Son histoire est celle d’une perte difficile à accepter, et qui influence sa vie ultérieure dans un sens peu positif. Le récit de Satoko et Hikari est également à l’image d’une société conservatrice dans laquelle l’adoption est peu courante, qui renvoie les femmes au foyer (ne pas travailler est une condition incontournable pour adopter un enfant) et dans laquelle une grossesse non désirée d’une jeune lycéenne est une honte pour la famille.

Si la structure du film joue sur différentes temporalités avec une construction non chronologique mais méticuleuse, il intègre également une touche de suspense. Naomi Kawase s’est en effet basée sur un roman qui a fait beaucoup de bruit lors de sa sortie au Japon, écrit par Mizuki Tsujimura, autrice de nombreux thrillers. Mais elle reste fidèle à son propre style, intégrant la nature à tout moment dans sa réalisation. Les images de la mer Intérieure sont particulièrement envoûtantes ; de nombreux plans rapprochés d’arbres dont les feuilles bruissent avec le vent et qui laissent passer les rayons tamisés du soleil entrecoupent le récit. Elle fait aussi des incursions dans la ville, montrant des panoramas de Tokyo, de jour comme de nuit. Certaines scènes-clé sont baignées d’une lumière éclatante, surexposant les images mais accentuant le côté émouvant et nostalgique du film, et renvoyant au prénom de la jeune fille, Hikari, qui signifie « lumière ».

Le film est long, 2h20 (et il faut regarder le générique jusqu’au bout). Cet étirement permet de développer les personnages mais certains passages un peu incongrus auraient pu être supprimés du récit, ou modifiés. Pourquoi le couple qui vit à Tokyo doit-il aller à Sapporo, à plusieurs heures d’avion, pour des traitements contre l’infertilité ? Que font ces yakuzas qui soudainement ajoutent un peu de sel pas vraiment nécessaire à l’histoire ? Et même la querelle de maternelle du début du film est un peu superflue. Mais au-delà de ces quelques défauts, Naomi Kawase propose un film touchant et lumineux sur la maternité et la sororité. Elle dresse le portrait intimiste des deux femmes, les mettant sur un pied d’égalité. Elle ne juge ni l’une ni l’autre, chacune ayant été bouleversée par l’arrivée d’un enfant.

True Mothers (Asa ga kuru), un film de Naomi Kawase

Japon - 2020 – 2h20 – VO st. FR & NL


Texte : Anne-Sophie De Sutter

Crédits photos : Cinéart

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Agenda des projections :

Sortie en Belgique le 28 juillet 2021, distribution : Cinéart

Bruxelles, Le Stockel

Bruxelles, Cinéma Galeries

Bruxelles, Vendôme

Rixensart, Ciné Centre

Charleroi, Quai 10

Tournai, Imagix

Liège, Le Parc

Liège, Sauvenière

Stavelot, Ciné Versailles

Namur, Cinéma Caméo

True Mothers - affiche

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