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Pointculture_cms | critique

VERTICAL ASCENT

publié le

En 2009, l’ubiquiste et toujours bien accompagné Moritz von Oswald sort un disque-somme sur le label de Damon Albarn.

Cet Allemand né en 1962 et résidant à Berlin est une véritable légende au sein des mondes électroniques mais aussi un homme bien occupé qui cumule les activités complémentaires de musicien, producteur et patron de label, mais aussi d’ingénieur du son (au sein de son studio Dubplates & Mastering) et d’informaticien. Il est par ailleurs un des concepteurs du logiciel musical Ableton Live, une référence dans le petit monde de la création sonore. Parmi ses nombreux faits d’armes, on épinglera le duo Basic Channel (aux côtés de Marc Ernestus), contributeur décisif à l’émergence de la techno dite minimale au début des années 1990 (Basic Channel deviendra également le nom du label qui publiera une bonne partie du travail du binôme). Sans omettre l’influent Chain Reaction, fondé par les mêmes en 1995, et aujourd’hui en sommeil. Une structure au riche catalogue, où figurent les Monolake, Fluxion et autres Vladislav Delay, et à l’intérieur de laquelle s’élabore un idiome électronique aux confins de la techno minimale, de l’ambient et d’une techno sous perfusion dub. Toujours au rayon de ses multiples pseudonymes artistiques, on retiendra Rhythm & Sound et Maurizio (tous deux en duo avec Ernestus) et on rappellera encore ses débuts dans les années 1980 au sein de Palais Schaumburg (avec Thomas Felhmann et Holger Hiller).
Plus discret mais loin d’être inactif dans les années 2000, Moritz von Oswald revient en 2009 dans une formule trio avec l’album Vertical Ascent publié sur le label généraliste Honest Jon’s codirigé par Damon Albarn. Outre Oswald, le trio se compose de Vladislav Delay et de Max Loderbauer (Sun Electric). L’homme revient en quelque sorte à ses premières amours après avoir publié l’année précédente Recomposed, un disque risqué, voire casse-gueule, qui l’entraîne, aux côtés de Carl Craig, dans une relecture électronique du répertoire des classiques Ravel et Moussorgski pour le compte de la Deutsche Grammophon. Une tournée sur ce thème en territoire américain avait suivi, le laissant dans un état de fatigue sans doute responsable d’un malaise cardiaque survenu à bord d’un avion.
Vertical Ascent marque donc le point de sortie d’une longue convalescence. Il est divisé en quatre longs chapitres d’une dizaine de minutes simplement nommés « Patterns » (de 1 à 4) Un album presque liquide tant il semble vouloir échapper aux oreilles qui veulent s’en saisir, mais totalement immersif par la fluidité enveloppante de sa texture sonore et la sensation de profondeur abyssale qu’il instille dans son champ. Ballotté entre l’immobilisme sensoriel engendré par une approche très dub du son (échos et réverbérations à foison sur un horizon fuyant) et une certaine inclination pour le mouvement continu (perpétuel ?) de par ses microrythmes millimétrés et étonnement complexes, Vertical Ascent semble davantage rechercher à épouser une vibration, une palpitation, à la fois étrange et familière, plutôt qu’à faire exister de (dis)sonnante façon les solutions offertes par quelques courbes d’équations à trois inconnues. Dépouillé, mais traversé en continu de cliquetis métalliques, de glitchs liquéfiés et de remontées de nappes synthétiques fugaces, ce disque est la preuve « vibrante » que microéconomie des moyens, minimalisme des formes et ménage à trois peuvent édifier des cathédrales sonores à mi-chemin de la Jamaïque et de Detroit.

Yannick Hustache

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