SPARROW
JAZZIATIQUE
À Hong Kong, « Sparrow » est le surnom donné aux pickpockets en raison de leur habileté. Cette allusion donne son titre au dernier film de Johnnie To qui s’éloigne ici des règlements de compte entre gangsters pour conter avec fraîcheur et légèreté un chassé-croisé amoureux qui met une bande de voleurs dans un beau pétrin.
La bande originale de « Sparrow » est signée Fred Avril et Xavier Jamaux, duo français qui n’en est pas à son coup d’essai: le premier a sorti sous son seul nom de famille deux albums chez F Communication (les très recommandables « That Horse Must Be Starving » en 2002 – lauréat cette année-là du premier Prix Constantin – et « Members only » en 2004), tandis que le second s’est illustré au sein de Ollano avant de se lancer dans la composition pour le cinéma. Il a signé, entre autres, des musiques pour « Tokyo Eyes » et « Young Yakuza » de Jean-Pierre Limosin, « Funny Games US » de Michael Hanneke, ainsi que la bande originale de « Mad Detective » de Johnnie To.
C’est en travaillant à cette dernière que Xavier Jamaux entama sa collaboration avec Fred Avril, une collaboration fructueuse sur le plan humain et artistique qui débouchera tout naturellement sur « Sparrow ».
Les dix-sept instrumentaux du duo français pour cette comédie policière fleurent bon la musique de restaurant asiatique avec sa nonchalance un brin « lounge ». Les sonorités orientales faites de cordes et de flûtes s’emmêlent en une danse sensuelle, charmante et charmeuse, faisant du gringue à des genres musicaux d’autres contrées, comme la bossa-nova ou le jazz de piano-bar, le grand talent de Xavier Jamaux et de Fred Avril étant de faire cohabiter avec douceur et naturel différents styles musicaux.
À cela s’ajoutent des clins d’œil – volontaires ou non – aux musiques de films que composèrent jadis Burt Bacharach et Serge Gainsbourg. On pense également à Ennio Morricone, à Michel Legrand et à Lalo Schifrin qui n’aurait certainement pas renié certaines rythmiques très « film noir ».
Les voix, quant à elles, font de la figuration de luxe et servent avant tout d’instrument complémentaire: ici, hommes et femmes sifflent, musent, chuchotent et font de petites percussions buccales sans jamais prononcer un mot, restant au service de la musique.
Après une première moitié d’album douce et légère s’ouvre une parenthèse plus sombre, empreinte de mélancolie pour finalement s’achever sur une note joyeuse… tout comme le film ?
À vrai dire, cette bande originale se suffit parfaitement à elle-même, développant une narration qui lui est propre avec ses compositions pleines de légèreté, mais aussi de profondeur. Un album tout doux, à écouter les jours de mauvaise humeur.
Catherine Thieron