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Pointculture_cms | critique

VOUS ÊTES JEUNE

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Sous une plume acérée et quelques accords, Yannick Le Nagard ne


Sous une plume acérée et quelques accords, Yannick Le Nagard ne verse pas dans la modernité. Entendez qu'il ne bouscule pas les styles établis. Il ne parcourut pas les chemins de l'innovant, là ne sont pas chez lui les desseins de son expression. Résolument contemporain pourtant, il s'adonne, depuis 1997, en artisan de la rime, à poursuivre la tradition d'une riche lignée de chansonniers. De ceux qui ont privilégié depuis plus de cinq décennies, le franc-mot à l'habillage. De Bruant auquel il rend hommage en adaptant À Bastignolles, rebaptisant la chanson phare  À la défense , en passant par Jean Sablon ou Jean Nohain qui aurait pu écrire pour Mireille Ton petit ventre , par Vian pour l'humour caustique et le swing. Et, en évidence, Georges Brassens à qui il emprunte les accords dépouillés et la verve vacharde. Lui qui annonçait « C'est cruel… Mais c'est la vie » présageant « encore un chef-d'œuvre » nous travaillait sournoisement au corps, tel ce gamin trop sérieux au costume trop grand trônant sur la pochette de son troisième album. Fallait-il se méfier de cet air anodin, de l'éclat malicieux perçu au coin des pupilles ! Comme une claque badine, rafraîchissante dans son ventilé. Sans tapages, cet aguerri des cafés-concerts, ayant fait ses premières dents Aux limonaires , en guise de mise en bouche, nous conseille quelque lecture saine dont La Barbarie douce  à qui il emprunte le fond et la forme pour tramer sa chanson titulaire. Le croque-note entame ainsi la fête contre les valeurs désormais consensuelles de la mondialisation néo-libérale. « Vous êtes jeunes / vous êtes modernes / C'est bien, continuez ! (Mais pas trop quand même eh, oh !) » C'est par cette échappée qu'il rejoint ses pairs également. En dressant quelques portraits vitrioliques, il rassemble le propos en autant de critiques sociales sans devenir revanchard. L'écriture souple et soignée n'en est pas moins acide et quelque peu irrévérencieuse. Brocardant au passage, mettant le feu sans peur du bûché, il fustige quelques icônes de l'église ou du show-biz, qu'elles s'appellent Jean-Paul ou Johnny. Sans omettre au détour, une incartade du côté de l'amour, en accessoiriste averti pratiquant les pataquès. Ce dynamiteur pouvant piéger, si vous êtes jeunes, vos confortables certitudes, ne sera jamais labellisé « pape de la chanson française de facture classique ». N'est pas Burgalat qui veut. Qu'importe, les niques sont parfois salutaires.

(Brigitte Lebleu, Charleroi)

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