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1995, Smoke et le Brooklyn de Paul Auster

Smell's like 90's spirit

publié le par Françoise Vandenwouwer

Smoke et Brooklyn Boogie, les deux films réalisés par Wayne Wang et Paul Auster receuillent dans les années 90 un succès mondial. Hommage à Brooklyn et à ses habitants, ils mettent en scène des fragments de vie de quelques clients d'un bureau de […]

Auteur révélé dans les années 80 par les trois romans formant « la trilogie newyorkaise », Paul Auster, confirmé depuis comme un tout grand écrivain américain,  publie dans les années 90, romans, nouvelles,  poèmes, pièces de théâtre, traductions, articles…  En 1990 il est contacté par Wayne Wang pour l’écriture du scénario d’un film, Smoke. Le film sera terminé en 1994 et suivi immédiatement par Blue in the face, distribué en France sous le titre Brooklyn  Boogie. Les deux films sortent respectivement en 1995 et 1996, ils recueillent un succès mondial et peuvent se compter parmi les films cultes des années 90. En 1997, l’écrivain reconnu dès lors par les milieux du cinéma, fait partie du jury du 50ème Festival de Cannes. La même année commence le tournage de Lulu on the bridge, écrit et réalisé par Paul Auster.  Le film sortira en France en 1998.

Smoke et Brooklyn Boogie sont un hommage à Brooklyn et à ses habitants croqués depuis la boutique d’Auggie, la Brooklyn Cigar Compagny, bureau de tabac fréquenté par des habitués. On  y parle d’affaires perso, on y règle des comptes, on s’y engueule, on s’y fait des confidences, on y  discute baseball et on y  joue de la musique.

Smoke met en scène des fragments de vie de quelques-uns des habitués, personnages empreints d’une philosophie du quotidien qui oscille entre une lucidité sombre, le sens de la dérision et un humour décalé. Marqués par les grands et petits drames de la vie, ils s’arrangent au jour le jour comme ils le peuvent avec elle. Auggie  gère la boutique, les discussions et le va et vient des clients, merveilleuse interprétation d’Harvey Keitel qui semble avoir toujours vécu derrière ce comptoir-là. Il y a Paul Benjamin, un écrivain anéanti par la mort de sa femme mais qui reste debout, écrit et fume des Schimmelpenninck. Il rencontre par hasard Rashid, jeune-homme perdu entre plusieurs histoires, qui entre dans sa vie et du même  coup dans celle d’Auggie et de la boutique. Apparaît Ruby une ex petite amie qui surgit avec son passé et celui d’Auggie.  Et Jimmy balaye la boutique, fait ce qu’on lui demande et mine de rien participe à  la vie du lieu. Les histoires s’enchainent les unes aux autres. Tendresse, gravité, humour, amour et amitié lient ces personnages semblables à ceux que l’on rencontre dans les romans de Paul Auster.

 

Brooklyn Boogie s’inscrit dans la continuation de Smoke. Suite de séquences entre interviews, discussions dans la boutique, et flashs sur le quartier et son histoire. Le film sécrète encore cette rare substance de chaleureuse humanité, malgré les complexités de la vie de chacun des êtres qui s’y croisent. Le ton est plus léger, les personnages plus joyeusement décalés. Il y a Dot qui veut quitter son mari, Vinnie (le patron de la Brooklyn Cigar Compagny et vieux pote d’Auggie) parce qu’il ne se décide pas à l’emmener à Las Végas et elle s’y verrait bien avec Auggie, et puis Violet, la maîtresse d’Auggie, follement éprise de lui et une belle diversité de personnages jouant de petits fragments épars de vie quotidienne, émouvants et drôles, terriblement humains.

Dans son livre, Paul Auster’s New York, Gérard de Cortanze, son biographe en France, rapporte ces propos de l’écrivain sur Brooklyn où il vit : « A Brooklyn, les gens ne se prennent pas au sérieux. C’est sans prétention, décontracté, facile. Brooklyn est un des lieux les plus démocratiques et les plus tolérants de la planète. On y trouve un mélange culturel qui me touche. Ce mélange de langues et de cultures, ces conceptions différentes de la vie : quel plaisir ! Poussez n’importe quelle porte de restaurant, vous y verrez toutes les races, toutes les couleurs, des plats d’horizons très divers. La normalité, c’est cette perpétuelle diversité. »

Deux pépites des années 90, à voir et à revoir pour se glisser dans ce tout petit coin du monde, cette petite boutique de quartier de rien du tout, le coin de rue d’Auggie Wren, où il se passe des choses, comme partout ailleurs.