20 ans du Magasin 4 - Jour 9
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Les 20 ans du Magasin 4, jour 9 (où comment depuis ce soir-là, je sais que le mot bruit se traduit par støy en norvégien)
Par (ir)respect pour une tradition désormais bien établie, on débarque après le set du premier groupe nommé Gura. Mais qui sait si un jour…
N’ayant pas choisi le nom le plus discret qui soie, Sida est une bande de malfrats soniques (un batteur, un guitariste et une vocaliste qui tâte aussi du synthé) qui lézarde en zone de turbulences, entre post-punk et (post-)no-wave, et que l’on pourrait rapprocher – avec une pincée de stridences de guitares en plus – d’un Vitas Guerulaitis qui a foulé cette même scène du reste il y a peu. Mélodies infantiles aux structures folâtres, dissonances à foison et cris suraigus, le trio rappelle un autre gang de cintrés géniaux du siècle dernier, God Is My Co-Pilot, mais manque encore un peu d’assurance et d’idées formellement abouties pour faire une différence nette entre un foutoir malin et habilement désorganisé et le grand n’importe quoi arty.
Tout aussi instables, les Canadiens de Shearing Pinx donnent dans un rock noisy, monté sur quelques mécanismes art-punk éruptifs. Autrement dit, une cacophonie comme on les aime, bien dans le rouge pour le bilan audiométrique, maintenue bride abattue et pour partie improvisée, mais où les mélodies serpentent en souplesse et où les rythmes catchy prennent l’auditeur par surprise entre deux ruades bruitistes. Hyper productif depuis ses débuts (2005), le groupe a déjà publié une quantité d’enregistrements sur son propre label et sous autant de formats qu’il en existe, mais semble souffrir d’un syndrome des plus paradoxal : il est excellent en première moitié de set et (un peu) pénible par la suite. Ca se soigne doc ?
Enfin, les princes norvégiens du bruit de ce soir, Noxagt nous assènent une nouvelle expérience de tolérance aux limites ultimes de l’audition humaine. Convertis de longue date à un rock noise mastoc répétitif et expérientiel, le groupe radicalise encore son propos et passe de trois crans supplémentaires sur l’échelle du jusqu’au-boutisme sonore. Les titres ont fait place à de très longs mouvements (3 au total !) sismographiques évolutifs grondants, dont le simple écho ferait fuir un troupeau entier de mastodontes ! Une lourdeur proverbiale, un climat presque nauséeux, et une sécheresse postindustrielle aux relents irradiés de fin du monde dans sa patine, le Noxagt relègue son batteur à une fonction de marteaux-pilons réglés sur un métronome ultra précis, son bassiste à celle d’un émetteur d’ondes gravitationnelles et son guitariste à une expertise de spéléologue spécialiste du magma à très haute température. On demeure interdit face à autant de maîtrise impassible et de sang froid cartésien, mais ce kraut rock « métalloïde » aussi misanthrope qu’un Godflesh en panne de machines, manque quelque peu de relents de cette humanité, certes si imparfaite, mais sans lesquels l’expérience tourne rapidement au vide mécanique.
YH