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Stéphane Arcas. Retour aux fondamentaux

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Avec Le petit chaperon rouge de la rue Pigalle, Stéphane Arcas délaisse son t-shirt kaki étoilé et pause la fronde à laquelle il nous avait habitué. Afin de servir les écrits de l’autrice et actrice Florence Hebbelynck, il revient, mot pour mot, à une mise en scène de texte intimiste et sans artifice. Plus classique qu'à l'accoutumée, cette proposition est un jeu de rôles échangés, une enquête qui, par souvenirs, interviews et rencontres, dessine le portrait de la mémorable et populaire Cathy au manteau rouge, une prostituée qui aimait jongler avec les grands méchants loups du quartier latin.

Toc, Toc, qui est là ?

Partant de fragments d’enregistrement où Cathy se confesse à demi-mots, Florence Hebbelynck se remémore l’image de cette femme qu’elle a croisée pendant plusieurs années en bas de chez elle. Bien qu’encore vivaces, les souvenirs sont lointains, appartenant à un Pigalle aujourd’hui disparu. De cette époque, comme du personnage, s’échappe une brume de légende épaisse, un brouillard que l’envie nous pousse à transpercer. Fascination ou intrigue ? Quelle est la vérité sur cette femme qui, tout au long de sa vie, dit avoir aimé les hommes sans jamais avoir été dominée, assumant hardiment ses choix et son destin. Tout cela est-il bien vrai ?

On s’aperçoit vite que l’on ne découvrira sans doute jamais la vérité nue. Si on la frôle un instant c’est pour mieux s’en éloigner. Les visions subjectives de chaque témoin ou de la famille, les traces tangibles, les fragments de documents sonores, s’entrecoupent autant qu’ils se contredisent. La charmante Dame au manteau rouge était l’actrice de son propre spectacle, une fable moderne. Dramatique. Elle s’amusait de son image mystérieuse, brouillant les pistes sans jamais laisser entrevoir la réalité ou les faiblesses. Ses hommes étaient tous des habituées, disait-elle. Mais pour devenir un habitué, il faut bien une première fois ? Ses hommes étaient tous bons et aimables, surenchérissait-elle. Vraiment ? Les doutes s’accumulent. Une seule certitude persiste, Cathy était seule maitresse de son destin, hors des règles et de toute bienséance.

Cathy, Florence, Nico, Stéphane et les autres

La mise en scène de Stéphane, le jeu de Florence ou celui de Nicolas ne tournent jamais autour de la problématique de la vertu « bienpensante » et « bien pensée ». Ils en font fi pour travailler de concert à la construction touchante d’un labyrinthe poétique de la remémoration : l’histoire de cette femme en lutte contre la malchance de sa naissance, contre son destin mal dessiné et vers cet avide nécessité de rester libre.

Nicolas Luçon est magistral dans son interprétation de la nièce de Cathy, agaçant dans la veste du réalisateur de documentaire intello, comique derrière les lunettes du mari bourgeois. Florence Hebbelynck est touchante à chaque fois qu’elle endosse le rôle de Cathy.

Stéphane Arcas surprend là où on n’a plus l’habitude de le voir, dans la fabrication d’un théâtre minimal fait de mots, seulement de mots. Il n’a pas perdu la main.

Avec Le petit chaperon rouge de la rue Pigalle, le Théâtre des Martyrs propose un spectacle intimiste et confidentiel. Entre drame et poésie, la thématique de la prostitution se détache des clichés pour laisser place au travail de remémoration et au récit de vie. Souvent touchant, drôle par instant, toujours intrigant, on cherche à découvrir qui fut cette femme mystérieuse, une femme croisée par tant de gens sans que personne ne la connaisse vraiment.

Crédit photo du spectacle : Estelle Rullier

Crédit photo de couverture : Gaël Maleux

Au Théâtre des Martyrs jusqu'au 9 octobre.

Jean-Jacques Goffinon

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