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Arts, culture et confinement (19) : Christelle Rousseau (Musée de la photographie de Charleroi)

"L’Ombre et son ombre", Bruxelles, 1932 Georgette et René Magritte - (c) 2019-2020 Charly Herscovici - SABAM
Actuellement, riche d’une exposition rare sur les clichés réalisés par René Magritte (et retrouvés après la mort du peintre), le Musée de la photographie de Charleroi est bien évidemment fermé au public. Les expositions vont-elles être postposées, annulées ? La directrice adjointe, Christelle Rousseau, nous explique les pertes et les défis imposés par la crise sanitaire.

- PointCulture : Depuis la mi-mars, le musée est fermé. Des expositions étaient-elles en cours ?

- Christelle Rousseau (Directrice adjointe du Musée de la photographie de Charleroi) : Conformément aux directives reçues du gouvernement, le Musée de la photographie a été contraint de fermer au public dès le samedi 14 mars, en ce compris les salles d’exposition bien entendu mais également le café du musée et la boutique. Il convient également d’y ajouter les annulations de visites guidées, stages, conférences et évènements d’entreprise. Ce sont donc l’ensemble des recettes propres du musée qui se trouvent réduites à zéro pour une période indéterminée.

Outre le manque à gagner financier important pour l’institution, c’étaient également les artistes actuellement aux cimaises qui se voyaient amputés d’une part importante de leur période d’exposition, réduisant fortement la possibilité pour eux de faire découvrir leur travail aux visiteurs. Nous avons donc très rapidement pris la décision de prolonger les expositions en cours jusqu’à septembre, au lieu de les fermer en mai, mais ça a nécessité un remaniement complet de la programmation des expositions sur les deux années à venir, afin de retrouver une place qui convienne pour chacun des auteurs dont nous avions prévu une présentation des œuvres. — Christelle Rousseau (Musée de la photographie de Charleroi)

- Les évènements sont-ils postposés ?

- Le travail de préparation des expositions s'étale sur plusieurs mois, voire une à deux années selon les projets. Il n'était pas concevable de réduire à néant un travail mené par les équipes du musée en étroite collaboration avec les photographes et/ou commissaires d'exposition, c'est pourquoi nous avons mené cette réorganisation de la programmation. De même, des évènements ponctuels d'envergure ont été postposés de six à douze mois, mais ne seront en aucun cas annulés.

- Comment évaluez-vous l’impact financier ?

- Comme indiqué plus haut, les recettes propres seront totalement inexistantes durant cette période de fermeture. La réorganisation de la programmation, avec la suppression d'une des trois périodes annuelles d'exposition, permettra certes de réduire les coûts de production, mais devra certainement s'accompagner d'une politique d'austérité du côté des dépenses.

Une aide extérieure exceptionnelle a d'ores et déjà été sollicitée auprès des autorités par la voix des fédérations professionnelles, qui ont chiffré l'impact sur le secteur des musées.

La situation financière personnelle des membres de l'équipe (pas moins de 36 personnes) nous préoccupe également. En effet, si les tâches de certaines fonctions, notamment scientifiques, peuvent être menées en télétravail, ce n’est pas le cas pour l’ensemble des collaborateurs pour lesquels, au cas par cas, nous avons dû réorganiser les tâches ou prendre la décision de la mise en chômage temporaire totale ou partielle, impactant par là-même leur budget familial. — Christelle Rousseau

- Certaines franges de la population vivent cette crise de manière critique. Des initiatives ont été prises dans le secteur culturel, est-ce votre cas ?

- Le confinement peut être très difficile à vivre, moralement et financièrement, à des degrés divers selon les personnes et leur situation. Il ne facilite pas non plus les contacts, limitant ceux-ci, en notre cas et pour préserver nos collaborateurs, à maintenir du lien par une présence virtuelle à travers les réseaux sociaux et des newsletters, par lesquelles nous nous inscrivons dans une initiative similaire à celle de Brussels Museums avec leur #MuseumAtHome.

- Avez-vous trouvé des solutions pour profiter de ce confinement à des fins positives ?

- Quand les urgences quotidiennes n'en sont plus, le travail de fond au niveau administratif et scientifique peut avancer plus sereinement. Et lorsque les espaces publics du musée sont vides de visiteurs, les interventions de maintenance - comme le rafraichissement des murs ou le nettoyage en profondeur des vitrines - sont plus aisées à mener.

- Pensez-vous que cette crise sanitaire soit la preuve qu'il faut repenser le monde, notre rapport au travail, nos structures sociales, nos rapports sociaux ?

- Je n'ai personnellement pas encore eu le temps, malheureusement, de réfléchir de façon approfondie à cette remise en cause de notre monde. Mais c'est sur ma to-do list...

- Au quotidien, comment occupez-vous votre temps, enfermée chez vous ?

Jonglant entre télétravail à temps plein et recherche d'occupations pour un enfant en première primaire, mon temps libre se réduit comme une peau de chagrin ! — Christelle Rousseau

> site du Musée de la photographie de Charleroi



Entretien réalisé (par e-mail) par Jean-Jacques Goffinon, première semaine d'avril

Photo de bannière : L’Ombre et son ombre, Bruxelles, 1932, Georgette et René Magritte / © 2019-2020, Charly Herscovici c/o SABAM (détail / photo verticale recadrée en bandeau horizontal)

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