Arts, culture et confinement (34) : revue du web, 8ème semaine
Sommaire
Sarah Maldoror ? C’est un guerrier ! — Jean Genet
Hommage à Sarah Maldoror, première cinéaste panafricaine
Née Sarah Ducados dans le Gers en 1929, d’un père guadeloupéen et d’une mère du Sud-Ouest, Sarah Maldoror, pionnière d’un cinéma panafricain et décolonisé, est morte du Covid-19 le 13 avril dernier. Peu connue du grand public, son parcours, ses choix de vie et de création sont pourtant passionnants ! En 1958, avec notamment Toto Bissainthe, elle fonde Les Griots, première troupe de théâtre noire à Paris, « pour en finir avec les rôles de servantes ». Peu de temps après, sur les conseils de Chris Marker, elle part étudier le cinéma à Moscou où elle rencontre entre autres le cinéaste sénégalais Ousmane Sembène. Elle participera ensuite aux luttes de libération anticoloniales en Guinée, en Guinéee-Bissau, en Algérie ; elle sera la compagne de Mario Pinto de Andrade (leader du Mouvement populaire de libération de l’Angola) ; à Alger elle participera aux tournages de La Bataille d’Alger de Pontecorvo (1965) et du Festival panafricain de William Klein (1969) ; son premier film Monangambe (1969) est mis en musique par l’Art Ensemble of Chicago… Sa filmographie enjambe allègrement les frontières entre documentaires et fictions, entre longs et courts métrages ; parmi la quarantaine de films qu’elle a tournés, on en dénombre pas moins de cinq liés à, ou d’après Aimé Césaire. Elle a beaucoup interrogé le racisme et le colonialisme, mais en multipliant les formes et les approches : par exemple, une mise en images de Et les chiens se taisaient d’Aimé Césaire dans la section Afrique des réserves du Musée de l’homme ou Un dessert pour Constance, comédie cocasse sur deux balayeurs parisiens d’origine africaine apprenant par cœur les ingrédients des incunables de la gastronomie française pour un jeu télévisé… [PD]
Ce mardi 12 mai, dès 21h (heure belge), hommage en ligne à Sarah Maldoror sur le site anglais Another Gaze – A Feminist Film Journal avec la participation de ses filles, une table ronde « Legacies of Sarah Maldoror », une lecture des Cahiers du retour au pays natal de Césaire
+ 3 films mis en ligne du vendredi 8 mai au mardi 12 mai
> s’inscrire en ligne ici !
Une rétrospective du cinéma japonais
Le BFI, le British Film Institute, comptait organiser une rétrospective du cinéma japonais dans les salles du Royaume-Uni entre mai et septembre 2020. Suite à la pandémie, il a décidé de programmer ces films sur le player intégré au site. Il proposera durant toute cette saison des classiques de Yasujiro Ozu, Kenji Mizoguchi ou Mikio Naruse, mais aussi des films de la nouvelle vague (Nagisa Oshima), des anime (Hayao Miyazaki, Satochi Kon) et des œuvres contemporaines (Takeshi Kitano, Naomi Kawase). Il y aura également une rétrospective des premiers films produits au Japon entre 1894 et 1914. [ASDS]
> BFI / Japan
Trash cinéma – Le Retour de la mort
Tant qu’à se moquer de tout ça, autant y aller franchement. C’est l’option qu’a manifestement choisie le Comité local de la Cinématographie, qui a bossé depuis ses montagnes du plateau de Millevaches, dans le Limousin, sur un film de détournement qui « voudrait tenter de dire quelque chose à propos de... ben de ce qu'il se passe en ce moment quoi, que ce soit dans l'intime, ou à échelle globale ». C’est volontiers potache, voire gras, avec une pincée d’humour noir, parfois assez intello quand même, on y croise des parisiens irritants, des communistes chinois, Michel Sardou et Gilles Deleuze, entre autres, et ça dure 45 minutes... [BD]
> le film sur Viméo
Gallica – les trésors en ligne de la Bibliothèque de France
La bibliothèque numérique de la BnF (Bibliothèque nationale de France) propose, parmi ses six millions de documents consultables en ligne, un peu plus de 1.500 vidéos, accessibles gratuitement. Ces références sont présentées en deux catégories : la première offre une sélection d’enregistrements de 2001 à 2018 de conférences d’écrivains, d’intellectuels et de créateurs de premier plan, organisées par la BnF ; la seconde propose des programmes ou des films à vocation pédagogique, réalisés pour la radio-télévision scolaire. Ainsi, sous la thématique « Arts et littérature », on trouve, entre autres, les premiers films d’Eric Rohmer dans les années 1960 ; sous le thème « Cinéma et audiovisuel », on peut découvrir quelques perles rares comme un abécédaire de Jean Douchet (cinéaste, critique et historien du cinéma) ou encore une interview de Chantal Akerman réalisée par Jacques Dugowson en 1983, la cinéaste avait alors 31 ans… [MR]
> site Gallica
Kanal, un musée en vitrines
La question de la réouverture des musées n’est pas encore totalement résolue. Dans l’intervalle, plusieurs institutions réfléchissent à des solutions alternatives qui ne soient pas des versions en ligne. Le Kanal, à Bruxelles, qui a la chance de disposer de grandes vitrines au niveau de la rue, va tenter une expérience d’exposition physique « protégée ». « La culture est avant tout une rencontre avec une œuvre, un artiste. C’est pourquoi le « musée virtuel » est un piège. Proposer des visites virtuelles en réponse au confinement part d’une bonne intention. Mais c’est, en réalité, en opposition avec la nature même du musée qui doit rester un lieu physique de rassemblement (même en petit nombre) », insiste Yves Goldstein, directeur de Kanal. [BD]
> Kanal / L'art se met en vitrine
Cette fois, c'est le Musée de la BD qui vient vers vous
Fermé en cette période de confinement, le Musée de la bande dessinée à Bruxelles et ses équipes ont néanmoins à cœur de continuer à faire vivre le 9e art à travers les réseaux sociaux et son site internet. Le musée lance un feuilleton quasi quotidien pour rester en contact avec ses publics et poursuivre sa mission de diffusion de connaissances sur la bande dessinée. Une façon aussi de rejoindre le mouvement #museumathome, hashtag qui relie les initiatives des musées bruxellois et qui vise à mettre en lumière la culture pendant cette période de confinement.
Du lundi au jeudi, le Musée de la BD propose un rendez-vous pratiquement quotidien destiné à tous les amateurs de bande dessinée. Une grille de publications met en avant son patrimoine et ses expositions temporaires. Elle donne également la parole aux auteurs qui souhaitent partager leur expérience de confinement, et, enfin, elle prodigue quelques conseils de lecture via ses « bédéthécaires », revisitant pour l’occasion leur bédéthèque. [YH]
> Centre belge de la BD / Museum at home
La Revue nouvelle en « Italique »
Prenant acte de la situation aggravée dans laquelle se trouve le secteur du livre et en attendant la réouverture des lieux consacrés à la lecture, en attendant surtout le retour de ces conversations qui font que nous voulons aimer les livres que ceux que nous aimons ont aimés, La Revue Nouvelle lance un concours au bon goût de madeleine. Il s'agit en effet de plonger dans sa mémoire et de laisser aux mots le soin de dire toute notre affection pour ces lieux étranges que sont les librairies, ces lieux où le temps ne se perd jamais. À quoi ressemble votre librairie préférée, qu'elle existe ou non ? [CDP]
> Revue nouvelle - concours « Italique »
Festival Unsound (Pologne) : Intermission et crowdfunding
Le festival Unsound, qui se déroule chaque année à Cracovie, en Pologne, mais se déplace également à l’occasion à New-York, à Toronto, etc., est lui aussi compromis cette année. Cette 18e édition sera remplacée par un projet ambitieux : Unsound 2020 : Intermission. La musique y laissera, en partie, la place à la parole et à l’écoute, en faisant des rencontres et des discussions qui se déroulaient en marge des concerts, le point central du festival. Les organisateurs considèrent qu’il est urgent d’entamer une réflexion sur la musique et surtout sur sa place et sa fonction dans la société. Conférences, illustrations sonores, rencontres, seront au programme, et un livre rassemblant les résultats est prévu (si le crowdfunding qui l’accompagne réussit). [BD]
Les propositions pour participer à cette version alternative du festival sont à proposer ici :
> festival Unsound - Intermission
Tujiko Noriko – Lifetime
Il y a plusieurs écoles du « live de confinement », certains artistes nous emmènent dans leur home studio, d’autres poussent les meubles et jouent dans le salon. Tujiko Noriko, elle, nous fait visiter sa maison. Tout le monde s’y met, les enfants chantent, tandis qu’une caméra se balade d’une pièce à l’autre, filme les chambres, explore le jardin, rêvasse au plafond, évite les miroirs (pas toujours). Tout ce qui peut servir à faire du bruit, à s’ajouter au flux de la musique, est envisagé et glissé furtivement dans la trame. Une déambulation en forme de dérive intime. « J'ai essayé de tirer le meilleur parti de notre confinement, en restant ensemble et unis » explique Tujiko Noriko. [BD]
> le Lifetime #20 sur Vimeo
Lockdownlullaby Project, des berceuses du monde entier
Lorsque le confinement a débuté, et son cortège d’annulations, la soprano belge Elise Caluwaerts s’est retrouvée devant une situation inédite : six mois de total désœuvrement en perspective. Pour combler ce vide et pour aider les nombreuses personnes angoissées par le confinement et l’insécurité provoquée par la crise sanitaire, elle a alors contacté la pianiste américaine Eleonora Pertz pour enregistrer des concerts en ligne. En optant pour les berceuses du monde entier, Elise Caluwaerts choisit un type de répertoire particulièrement propice à créer des moments d’intimité. Partant de berceuses romantiques avec Brahms, Dvorak et Fauré, les musiciennes se sont vu proposer des créations de compositeurs du monde entier, séduits par leur entreprise. Ce développement inattendu du « Lockdownlullaby Project » pourrait à terme donner naissance à un enregistrement en fin d’année. À suivre ! [NR]
> Lockdownlullaby Project sur Youtube
Charleroi danse, fenêtres sur la danse
Une première fenêtre s’ouvre sur une femme vêtue de rouge, étendue sur le sol de la forêt. Quand elle se relève, une épaisse chevelure noire masque son visage. Une autre fenêtre révèle la présence d’un homme dans un jardin, les yeux bandés. Une autre fenêtre encore et c’est une sirène. Elle sort d’une baignoire, langoureuse et incongrue. Les fenêtres s’intitulent L’Ambition de disparaître, Confiance à l’aveugle et Mermaid. Il y a aussi La Confiture, une scène de ménage en mode accéléré, ou encore Slime, mise en abyme à caractère très sexuel. L’idée vient de Charleroi Danse. Les instants artistiques sont des propositions émanant de danseurs vivant en Belgique francophone. Les performances ne durent pas plus de cinq minutes et sont filmées à l’étroit, confinement oblige, à l'aide d'un téléphone. Il y en aura quarante au total, diffusées sur une chaîne dédiée, du 1er mai au 30 juin. Bonne nouvelle : les artistes sont rémunérés. Autre bonne nouvelle : les ambiances sont aussi variées que réjouissantes et inattendues. [CDP]
> site Charleroi danse - Un instant artistique
Photos de bannière : Sarah Maldoror
Avec la participation d'Anne-Sophie De Sutter, Philippe Delvosalle, Marc Roesems, Nathalie Ronvaux, Catherine De Poortere, Yannick Hustache et Benoit Deuxant.
Cet article fait partie du dossier Arts, culture et confinement | Revues du web.
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