Au Varia, un Hymne à l'imperfection signé Maky
J'ai toujours eu un problème avec la parole / Depuis toujours depuis l'école / On me disait que je parlais trop / Que je bougeais trop / On m'a souvent dit de la fermer / Alors je suis venu pour l'ouvrir. — Maky
D’entrée Maky (Mathieu d’Angelo) apostrophe le public. Où, pour le coup, se tient un fort contingent scolaire de jeunes ados issus d’un quartier populaire de Bruxelles. L’histoire qu’il va leur raconter pourrait être quelque part la leur, ou du moins, elle pose un miroir devant les parcours personnels et éducatifs possiblement chahutés de certains d’entre eux. Il va aussi leur demander de lui donner des mots, sans autre indication que de livrer ceux qui leur traversent la tête en cet instant précis.
Les mots, c’est la grande affaire de la vie de ce bavard patenté, « inadapté de l’apprentissage », gavé de Ritaline parce que diagnostiqué hyperkinétique et initialement relégué dans l’enseignement spécial, puis obligé de retourner sur les bancs de plusieurs écoles pour enfin boucler un cursus dans le général, à un âge où beaucoup terminent leurs années dans le supérieur.
La suite n’est guère plus réjouissante avec une entrée dans la vie active par la filière conseiller commercial puis dans la téléphonie mobile. Passage en revue des (très petites) joies, et surtout des peines, interminables nuits d’insomnie à broyer du noir et ruminer ses angoisses, mais surtout à abandonner petit à petit les rêves de ce qu’il s’était promis de devenir.
Heureusement pour Maky, il y a eu et il y aura le hip-hop, cette poésie musicale de la fin du XXème/début XXIème siècle. Sur cette scène presque nue du Petit Varia, Maky a un partenaire de jeu, ou plutôt de son, Fabot (Fabrice Blin), davantage « sound designer » que simple DJ, aux interventions musicales aussi précises qu’essentielles.
Une chaise, des baffles épars et suspendus par des chaines tapissent l’arrière-scène et lui revoient parfois l’écho de ses échecs passés (voix des profs), mais l’un deux, plus massif et accroché plus en avant recevra de notre homme un traitement physique à la hauteur d’un sac de sable grésillant. Enfin, tout au fond, un mur se charge au besoin d’effets lumineux ou encore de phrases et de mots. Des mots comme ceux, hétéroclites, collectés pendant la « phase de chauffe » qui fourniront les ingrédients verbaux immédiats d’un slam improvisé sans filet, mais parfaitement intégré à une trame et narrative biographique souple, et qui se déleste ainsi d’une part de sa charge dramatique d’origine pour épouser les formes souples d’une poésie de l’instant, libératoire, tendre et souvent amusante. Les « Freestyle » fusent en cascade depuis les gradins.
Un récit de vie généreux en détails (l’écriteau du cancre, le papier-collant sur les lèvres), mais qui se conclut de façon presque abrupte. Comme si les expériences « ordinaires » actuelles d’un Maky « bien dans ses baskets » (il a sorti un disque en 2014 et dirige un atelier d’écriture) ne valaient pas la peine d’être racontées.
On veut en savoir plus et c’est à ce moment précis que la deuxième mi-temps débute. Par un échange questions/réponses avec un public, tout sauf indifférent…
Imperfection, quand tu nous tiens…
Yannick Hustache
Hymne à l'imperfection
Maky (Mathieu d'Angelo) et Fabot (Fabrice Blin)
Mise en scène Manuel Antonio Pereira
Petit Varia
78 rue du Sceptre
1050 Bruxelles
Du 17 novembre au 02 décembre 2017
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