Bizzim Bakkal (Kreuzberg, Berlin): "Notre épicerie" !
Sommaire
À Berlin, comme dans beaucoup de villes, la spirale des prix
des loyers continue à tourner.
Au début des années 2000, la capitale allemande
était encore réputée pour ses loyers abordables, un critère qui a certainement
contribué à attirer des jeunes adultes même d’au-delà des frontières allemandes
à s’installer dans les quartiers branchés comme Kreuzberg, Friedrichhain,
Neukölln, Mitte ou encore Charlottenburg. Cette situation semble passée
aujourd’hui.
Depuis 2009, les chiffres officiels démontrent effectivement des augmentations de loyers entre 30%... et 100% dans les quartiers proches du centre-ville. Selon la coopérative « IG Bauen-Agrar-Umwelt » dans beaucoup de lieux même les personnes à revenu moyen ne peuvent plus se permettre de déménager. Les prix des espaces habitables sont devenus un défi financier pour plus de la moitié de la population [1]. À certains endroits le manque de logements concerne néanmoins la classe moyenne de la société. Effectivement une étude sur la disponibilité de logements menée par le parti politique Die Linke chiffre le manque de logements à Berlin à 110.000 [2]. Paradoxalement les déplacements forcés sont à l’ordre du jour, tandis que les bâtiments restent vides souvent pendant de longues durées [3].
Cette problématique est le résultat d’un système financier complexe, sans pour autant être un cas isolé. En effet les investissements immobiliers privés en vue de profit font partie d’une logique récurrente à l’échelle mondiale, notamment aux États-Unis, en Europe et dans les métropoles d'autres régions du monde.
Bizim Bakkal: "Notre épicerie" !
L’épicerie Bizim Bakkal (notre magasin en turc), tenue par la famille Çalışkan, située Wrangelstraße 77 à Kreuzberg est devenue symbole dans le combat contre ces méthodes entrepreneuriales, connues aussi sous le nom de gentrification. En 2015, le propriétaire a envoyé une première résiliation de bail à la famille, ainsi qu’aux autres locataires de l’immeuble. Ils étaient invités à quitter les lieux au plus tard pour fin septembre 2016, mais recevraient une indemnité s’ils partent plus tôt [4]. Ensuite, des rénovations du bâtiment visent à attirer des habitants plus aisés. Une séparation de l’espace commercial est également planifiée pour augmenter les profits [4]. Dans ce cadre-ci, il est important de se rappeler des conséquences des déplacements qui ont une double facette :
- au niveau individuel, pour certains la perte d’un appartement peut être le début d’une situation très critique;
- au niveau collectif, la population
du quartier socialement mixte à la base se dirige vers une mono-classe excluant
ceux qui n’ont pas les moyens de rester.
Bizzim Kiez: "Notre quartier" !
Le travail des citoyens porte ses premiers fruits : l’épicerie Bizim Bakkal remporte son premier combat. Mais la bataille n’est pas finie. Pour l’instant, la demande de résiliation de bail a été annulée. Malgré cette première victoire, le futur reste incertain pour la famille Çalışkan ainsi que d’autres habitants du Wrangelkiez. La mission de Bizim Kiez continue tandis que les banderoles "Bizim Bakkal reste !" [cf. ci-dessus] ou "Je suis Bizim Bakkal!" décorent la Wrangelstraße.
Roxana Černický
sources:
[1] http://interaktiv.morgenpost.de/berlinmieten/
[2] http://www.linksfraktion-berlin.de
[3] http://www.bizim-kiez.de/blog/
[4] http://www.bizim-kiez.de/fr/
[5] Bizim = notre en turc, Kiez = quartier en allemand
Cet article fait partie du dossier Berlin.
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