Expo « Nice Shirt ! » (PointCulture Namur) : « Chaque t-shirt a son histoire »
- Astrid Jansen (PointCulture) : Tu te rappelles du premier t-shirt que tu as acheté ?
- Le fan / collectionneur anonyme : Oui, c’était lors d’un concert de The Smashing Pumpkins au Flanders Expo à Gand, en 1996. Le groupe commençait vraiment à exploser avec la tournée Mellon Collie and the Infinite Sadness. Je me rappelle du ticket du concert car ils étaient encore personnalisés à cette époque. Ce n’étaient pas les pages presque blanches ou les QR codes de maintenant. C’est mon premier grand concert. J’avais pris le train, j’avais 18 ans, mes parents sont venus me chercher et ils en ont profité pour m’emmener à la mer. C’était tout un truc…
- Pourquoi as-tu choisi ce t-shirt, à ce moment-là, et pourquoi as-tu continué d’en acheter ?
- Est-ce que c’était pour marquer le coup ? Encore maintenant, plus de 25 ans plus tard, je ne sais pas pourquoi j’achète des t-shirts de groupes. Déjà, ce n’est pas systématique – et heureusement car j’en aurais vraiment beaucoup plus. J’achète un t-shirt soit pour l’émotion procurée lors du concert, soit pour le souvenir ou, tout simplement, parce que je le trouve beau. Et évidemment je les porte. Mais, ça n’est jamais pour parader. L’aspect graphique est très important. Il m’est arrivé d’adorer un concert mais de détester le t-shirt et, là, j’ai des limites. Il y a aussi tous les t-shirts que je regrette de ne pas avoir achetés [rires]. J’avais aussi dit que je n’en achèterais plus… Mais ça c’est foutu. Ça répond toujours à une sorte d’instinct en fait...
Je n’ai jamais pensé en faire une collection. Elle s’est faite au gré de vingt-cinq ans de concerts. — le fan anonyme
- 25 années, plus de 75 t-shirts, forcément, tu as réussi à les garder en bon état.
- Oui, j’en ai beaucoup plus et certains ont disparu. Même si on voit que l’un ou l’autre ont bien vécu ! Celui de Nada Surf n’est plus très blanc…
- Il y en a beaucoup de Nada Surf justement !
- J’adore beaucoup de groupes mais, je ne sais pas pourquoi, Nada Surf en particulier, je les suis presque partout depuis plus de vingt ans. Je les ai vus au moins vingt fois sur scène. C’est comme si j’avais une histoire avec eux. Ils m’accompagnent depuis des années. Ce sont des compagnons. Ça peut paraitre idiot de dire ça mais c’est la réalité.
Quand je vois Nada Surf sur scène c’est comme retrouver ce vieux copain que tu vois deux fois par an. Dès que tu es avec lui, c’est comme si tu l’avais quitté la veille. De nouveau, tous ces t-shirts touchent une corde intime. Je ne suis pas un fan qui parle avec les groupes mais j’aime les suivre. — le fan anonyme
- La diversité des t-shirts est impressionnante, on passe de Muse à Ratatat en passant par Marcel et son orchestre ou, encore, Squid…
- C’est aussi dû à une époque. Entre 2003 et 2008, j’ai été boulimique de concerts, j’en « faisais » des centaines par an. Tout m’intéressait. J’étais plus jeune, j’avais plus de temps. Aujourd’hui, j’ai une famille, des enfants, je dois être plus sélectif.
- Il y a des anecdotes qui te marquent plus que d’autres ?
- C’est marrant, quand j’y pense, je me rappelle de détails, plus que des concerts eux-mêmes… Ce sont beaucoup de souvenirs qui n’ont rien d’extraordinaires mais qui me sont précieux. Par exemple : J’ai acheté un t-shirt des Libertines après leur premier concert en Belgique au Witloof Bar. C’était la dernière date de leur première tournée, il ne restait que deux t-shirts. Il ne doit y avoir que deux ou trois t-shirts comme celui-là en Belgique… C’était avant qu’ils ne décollent. J’ai souvent acheté des t-shirts de groupes qui ne sont pas connus ou pas encore. Muse par exemple, quand je les ai vus, c’était le tout début pour eux. Même si leur musique m’a moins intéressé avec le temps, le t-shirt reste un bon souvenir de ce concert au Botanique.
- Pourquoi as-tu accepté de prêter tes t-shirts pour cette expo ?
Ce n’est pas une « collection », juste des t-shirts de concerts comme beaucoup en achètent, mais j’aime bien l’idée que cette expo peut accompagner les visiteurs dans au moins un souvenir de concert. Je pense que l’exposition partage des émotions, de la joie, elle rappelle que les concerts sont importants. — le fan anonyme
Ils sont l’aboutissement d’un travail d’artistes, un important vecteur social. Il s’agit de partage. L’expo est aussi un moment pour se marrer je pense. Par exemple, l’un des t-shirts, je l’ai reçu d’un ami. À force de m’entendre dire que j’aimais ce t-shirt qu’il portait parfois, il me l’a donné. C’est celui de Ich Bin, il me fait rire !
- Nice Shirt !, pourquoi ce titre ?
- Au-delà du fait que c’est une expression qu’on entend souvent en festival (c’est vrai, parfois, on se sent un peu faire partie d’une communauté musicale), le titre est lié à une anecdote qui me touche personnellement.
Je portais le t-shirt du groupe Songs : Ohia, un groupe que j’aime énormément ! C’était en 2017 lors d’un festival en Espagne. J’ai croisé une femme qui regardait mon t-shirt et elle m’a dit « Nice shirt ! ». Je l’ai reconnue, c’était la femme du chanteur de Songs: Ohia, décédé en 2013. Grâce à mon t-shirt, au milieu de 80 000 personnes, j’ai entamé une discussion avec elle. C’est une histoire toute simple au fond. Dix minutes suspendues, improbables. Mais qui comptent pour moi. — le fan anonyme
Interview : Astrid Jansen
Photos : PointCulture Namur
Retrouvez la playlist créée spécifiquement pour l’expo sur les plateformes d’écoute suivantes : Spotify - Deezer - Youtube - Tidal
Nice Shirt !
Jusqu'au Samedi 26 février 2022
PointCulture Namur
Le Delta
18 avenue Fernand Golenvaux
5000 Namur