Festival AlimenTerre 2017 - zoom sur les semences

À Bruxelles et ensuite à Arlon, Charleroi, Liège, Ottignies, Louvain-la-Neuve et Namur, AlimenTerre vous propose de réfléchir et d’agir pour un système agroalimentaire plus juste et durable en s’appuyant sur sept documentaires inédits ou méconnus. Climat, permaculture, pesticides, semences, etc. : les sujets tabous seront mis sur la table avec des débats, des ateliers et des rencontres. Vous en prendrez bien une part ?
Une édition bruxelloise et cinq éditions wallonnes du 7 octobre au 10 novembre :festivalalimenterre.be
Les semences
Peu de choses sur terre sont aussi miraculeuses et vitales que les graines. Cependant, au cours du XXe siècle, 94% des variétés de ces semences qui existaient depuis l’aube de l’humanité ont disparu. — -Zoom sur les semences avec :
- le film Seed (projeté le 18 octobre à Liège et le 19 à Arlon, Ottignies et Namur ; le 24 à Charleroi)
- l’interview de Damien Van Miegroet de la coopérative Cycle en terre.
Le
film : Seed, the Untold Story
Des témoignages convaincants de personnes passionnées, la poésie de jolis gros plans sur des graines aux contours soulignés par une lumière chaude et caressante et de courtes séquences didactiques s’allient ici pour faire le point sur les semences.
Le film est tout d’abord un hommage aux graines, à leur diversité, à la fois belle et étrange, à leur caractère essentiel pour la vie et à ce fascinant pouvoir de germination presque magique qu’elles renferment comme on protège un secret. Certaines doivent être brulées, d’autres digérées ou transportées accrochées par les poils des animaux ou soulevées le vent sur des kilomètres pour germer. Elles peuvent rester en sommeil un certain temps en attendant des conditions plus favorables à la vie. Les graines paraissent ici fortes et essentielles autant que fragiles et menacées par les compagnies biotechnologiques en quête de manipulation et de privatisation du vivant.
En un siècle, nous avons ainsi perdu 94% des variétés des semences existantes. Par ailleurs, on ne cultive qu’une infime sélection des variétés qui existent dans la nature. C’est ce constat qui a motivé le film. Les réalisateurs ont rencontré des botanistes, des paysans, des militants, des hommes et des femmes qui s’impliquent aux quatre coins du monde dans la préservation des semences. Certains les cultivent, d’autres les stockent dans des banques, d’autres encore enseignent leur culture et leur conservation ou se mobilisent contre les groupes industriels de la chimie et la biotechnologie. Leurs différentes approches, pratiques et sensibilité permettent de comprendre les dysfonctionnements d’un système agricole néfaste pour la santé humaine et les écosystèmes.Quand on perd nos graines, on perd tout un art de se nourrir. — -
Questions à Cycle en Terre
Cycle en Terre est une coopérative qui a pour mission de contribuer à notre autonomie alimentaire au travers de la production, du traitement et de la commercialisation des semences potagères biologiques. Notre action comprend l’acquisition et le transfert de connaissances et de savoir-faire dans ce domaine. Nous avons posé quelques questions à Damien Van Miegroet, administrateur au sein de l’asbl Cycle en Terre.
- Qu’est-ce qui t’as a amené à t’intéresser aux semences dans votre histoire personnelle ?
C’est l’histoire d’une rencontre. Je souhaitais investir dans un petit terrain agricole et le mettre à disposition d’un jeune maraîcher. J’ai contacté plusieurs associations pour relayer l’information et c’est Fanny qui m’a contacté. Son projet, à la fois idéaliste et ancré dans la réalité, donnait beaucoup de sens. C’est surtout l’autonomie alimentaire et l’acquisition et le transfert de connaissances et de savoir-faire qui m’ont touché. J’ai accompagné Fanny durant plusieurs mois et nous avons créé avec Bruno la coopérative Cycle en Terre en novembre dernier. J’ai finalement investi l’argent du terrain directement dans la coopérative.
- Quelle est la situation des semences potagères en Belgique ?
À ma connaissance, il n’y a quasiment pas de production en Belgique. Nous sommes complétement dépendants des importations de semences. Sans les semences et sans la connaissance pour les produire, c’est la base de la culture potagère que nous avons perdu.
Il n’y a que peu de projets qui ont démarré en Belgique ces vingt dernières années pour conserver ou retrouver les techniques de reproduction et sauvegarder le patrimoine légumier régional.
Avec Cycle en Terre, nous souhaitons produire et faire produire en Belgique des quantités de semences reproductibles et biologiques à l’attention des jardiniers amateurs mais également des maraîchers locaux. De cette manière, on pourra plus facilement acheter des légumes bio vraiment locaux.
- En défendant les semences reproductibles, que
défend-on au juste ?
On défend le droit à tout un chacun de reproduire les légumes qu’il cultive, le droit à tout un chacun d’effectuer sa propre sélection de semences de légumes.
On défend également l’idée que les semences sont un héritage de nos ancêtres, qu’elles appartiennent à l’humanité, qu’elles sont accessibles à tous et que les connaissances, les savoir-faire pour les produire doivent continuer à se perpétuer aux générations suivantes.
Cela pose des questions de fond par rapport à l’agriculture à laquelle nous aspirons et au modèle économique derrière l’industrie agroalimentaire qui en découle.
- As-tu une préférence pour une graine en particulier ?
Je n’ai pas de préférence pour une graine en particulier mais je suis toujours surpris de voir qu’un seul gramme de semences de tomates génère plus de 200 plants de tomates ! C’est assez incroyable quand on y pense.
- Qu’est-ce que tu retiens du film Seed, the Untold Story ?
J’ai été marqué par la beauté des images. Les gros plans sur les légumes et les semences, en particulier les incroyables variétés de maïs, les séquences accélérées sur la croissance des légumes. On ne peut qu’être émerveillé
D’un autre côté, j’ai été impressionné par la passion qui animait les intervenants. On sent qu’ils sont investis d’une mission qui va au-delà de leur existence, une responsabilité vis-à-vis des générations futures pour sauvegarder la diversité des variétés comme l’avaient fait leur ancêtres avant eux. Le film nous fait percevoir l’aspect spirituel lié au travail des semences.
Propos recueillis par Frédérique Müller – octobre 2017