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Inde: Pandit Pran Nath et l’Occident

Inde, Jon Hassell, Occident, Terry Riley, LaMonte Young, Pandit Pran Nath

publié le par Anne-Sophie Smudesutter

L'influence du musicien indien Pandit Pran Nath sur des artistes américains comme LaMonte Young, Terry Riley et Jon Hassell

Sommaire

Pandit Pran Nath

Pandit Pran Nath, San Francisco 1977. Photo: B & B Xolote.
Copyright © The Pandit Pran Nath Musical Composition Trust

Si l’impact de Ravi Shakar ou Ali Akbar Khan dans la découverte par l’Occident de la musique indienne a déjà été bien documenté, l’influence de Pandit Pran Nath, bien que moins connue, a été tout aussi importante. Durant son séjour en Occident, il a cherché à propager l’esprit de la musique indienne, plus que sa forme, et a encouragé le développement personnel des musiciens qui sont devenus ses disciples, plutôt que de leur transmettre un répertoire et une technique.

Né à Lahore en 1918, Pran Nath n’était pas destiné à devenir musicien, et c’est au prix d’une rupture totale avec sa famille qu’il a pu suivre cette voie. C’est son maître, Ustad Abdul Wahid Khan, maître du style vocal du gharana (école) de Kirana, qui lui a demandé, ou plutôt ordonné, d’œuvrer à la diffusion de la musique indienne à travers le monde. Il a donc en 1949 quitté sa retraite au temple de Shiva, à Tapkeshwar, pour retourner à la vie profane. Il travaille un temps pour la radio AIR, à Delhi, puis donne cours à l’université de la même ville, où la légende raconte que les étudiants étaient par trop impressionnés par ses capacités vocales et son entraînement et renonçaient les uns après les autres, pensant ne jamais arriver à une telle maîtrise.

En 1967, La Monte Young et Marian Zazeela entendent pour la première fois un enregistrement de Pran Nath, et le font découvrir à de nombreux autres musiciens, comme Terry Riley. Ils décident en 1970 de le faire venir à New York. Dès son arrivée, séduits par l’homme autant que par sa virtuosité, ils vont rapidement devenir ses disciples et l’héberger. Terry Riley le rencontre quelques temps plus tard et c’est Pran Nath cette fois qui insiste pour que Riley devienne lui aussi son disciple. Ils vont intensivement travailler ensemble, puis Riley l’accompagnera en Inde durant six mois pour perfectionner son apprentissage. Pour Riley comme pour Young, l’enseignement de Pran Nath va confirmer l’orientation de leurs travaux respectifs, sur la répétition pour le premier, et  sur l’intonation juste, les notes tenues et le drone pour le second. Young, dont la fascination pour les drones remonte à une enfance passée à écouter le son du vent dans les lignes téléphoniques de son Idaho natal, a déjà alors composé des pièces inspirées de la musique indienne, et basées sur des notes tenues, notamment son trio pour cordes de 1958. Terry Riley a de son côté composé en 1964 sa pièce "In C", consistant en la répétition de courtes séquences mélodiques, unifiées par une même tonalité, et dont l’écriture ouverte était  révolutionnaire pour l’époque. Young, Marian Zazeela et lui vont ainsi suivre l’enseignement de Pran Nath, mais aussi et surtout ils vont reproduire aux États-Unis le modèle de l’éducation musicale indienne, avec un maître et des disciples qui non seulement étudient avec lui, mais vivent avec lui et le servent. Ils seront les premiers occidentaux à établir une relation guru-shishya avec un maître de musique oriental, une relation qui s’était à cette époque rarement vue en dehors des arts martiaux.

Pran Nath sera un maître exigeant, à la discipline stricte, mais qui exhortera ses disciples à trouver leur propre voie, en dehors des formes existantes. Durant les quelques années qu’il passera aux États-Unis, il organisera et jouera de nombreux concerts de ragas, insistant tout spécialement sur l’obligation de respecter leur signification traditionnelle et notamment le moment du jour pour lequel ils étaient composés. Il prendra encore d’autres disciples comme Jon Hassell et donnera des leçons à de nombreux musiciens comme Don Cherry, Lee Konitz ou Jon Gibson, avant d’ouvrir en 1972 le Kirana Center for Indian Classical Music à New York. Des problèmes de santé récurrents, suite à une attaque cardiaque en 1978, le contraindront à limiter ses performances publiques. Il donnera un dernier concert en 1996 mais décèdera d’un arrêt cardiaque cette même année.

Son influence – et à travers lui celle du raga - se poursuivra dans les travaux de l’école minimaliste de New York, et dans l’œuvre de ses disciples. Le minimalisme aura en commun avec la musique indienne une approche cyclique du rythme et de la mélodie, ainsi que l’idée d’un rituel transformateur pour le public comme pour le musicien. Il sera pareillement marqué par  la recherche d’une pureté et d’une précision des sons, une investigation de la transe et une exploration de la nature du son lui-même.

(Benoit Deuxant)

Discographie:




Et aussi:

Pandit Pran Nath : Raga Cycle, Palace Theatre, Paris 1972 - MW6631
Pandit Pran Nath avec le Kronos Quartet - Short Stories - FA1985
Terry Riley: Atlantis Nath - XR619Z
Terry Riley: Descending Moonshine Dervishes /  Songs For The Ten Voices Of The Two Prophets  - XR619N
Terry Riley: Persian Surgery Dervishes - XR619C
La Monte Young:  Dream House 78'17' - XY560A
La Monte Young:  Second Dream Of The High-Tension Line Stepdown Transformer - XY560C
Jon Hassell: Aka Darbari Java [Magic Realism] - XH270D

Une longue plage à écouter:



 

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